Tout est art ? Ben semble penser que oui et vous ?

L’un des événements de cette rentrée c’est la réouverture du musée Maillol après plus d’un an de travaux.

J’ai personnellement pour ce Musée un attachement particulier lié aux très belles expositions temporaires de ces dernières années. Ceux qui ont eu la chance de voir les expositions sur Florence et les Médicis, sur les Borgias, Venise par Canaletto et Guardi, les trésors de Pompéi et j’en passe, savent de quoi je parle.

J’étais donc à la fois triste de sa fermeture mais aussi pleine d’espérance pour ce que l’équipe du musée nous réservait de nouveautés. Et bien…finis l’Antiquité et la peinture classique !bandeauevenementv2

Ce dernier qui est désormais géré par Culturespace (comme Jacquemart André) nous propose une exposition que l’on ne s’attendait pas à voir ici, une exposition d’art contemporain. Car en accord avec l’esprit de la fondation Dina Vierny, ce sera bien de l’art moderne et contemporain qui sera désormais à l’honneur dans ce lieu.

On commence donc avec une rétrospective de l’artiste Ben qui nous interroge sur la nature de l’art et même si moi et l’art contemporain on n’est pas toujours amis, cette exposition est marrante, ludique, interactive et fait du bien.

Ben c’est cet artiste que tout le monde connait sans connaître. Celui qui écrit des petites phrases percutantes, qu’on trouve entre autres sur des agendas ou des pots à crayons aujourd’hui.
Mais avant les fournitures scolaires, Ben, Benjamin Vautier (né en 1935) de son vrai nom, c’est quelqu’un qui signe tout et interroge la société sur ce qui est art. Et comme le dit le titre de l’exposition, tout devient art pour le peu qu’on le veuille. Vous découvrirez ainsi comment il a décidé que sa mort serait une œuvre, que son urine ou une crotte de nez pouvait l’être aussi.  Quand il dit tout, c’est tout !

Avec Ben, l’art est dans la pensée de l’artiste et non plus forcément dans la réalisation. C’est la quintessence de la pensée artistique qui est décortiquée à l’extrême. Alors oui c’est drôle, on s’amuse, on peut jouer avec certains objets ou même envoyer des cartes postales.
C’est un peu comme parcourir les milles-et-unes idées d’un sale gosse qui de son propre aveu a un certain égo.

9427
Une histoire de paraître de séduire, 2014, 80 x 80 cm, acrylique sur toile, collection de l’artiste.

Ben rejoint en 1962 le mouvement Fluxus et en est un fidèle ambassadeur en France et cette exposition une vitrine très claire de cette pensée du non-art. Fluxus s’interroge sur la question de ce qui est art ou pas art dans les années 60-70 et s’appuie sur un discourt de dérision en utilisant la distraction pour interpeller le public. C’est exactement ce que fait Ben en se mettant en scène de toutes les manières possibles.

Mais ce que je préfère dans son art reste ses écritures. Ses phrases simples percutantes, souvent amusantes qui sont des portes sur tout un tas de réflexions.

Oui c’est une exposition bien sympathique qui amorce la nouvelle vie du musée Maillol. Une exposition qui vise aussi bien les connaisseurs de l’art, qui se retrouveront dans ces questions « métaphysique » de l’essence artistique, et une réflexion générale sur notre époque, mais une exposition qui  vise également les amateurs et même les enfants qui s’amuseront comme des petits fous devant les cochons peintres et autres drôleries.

BEN, COMMISSAIRE DE LA SECTION CONTEMPORAINE
ANDRES PARDEY, COMMISSAIRE DE LA SECTION HISTORIQUE

Tout est art ? Ben au musée Maillol

14 septembre 2016-15 janvier 2017

 

 

 

 

Les Borgia lèvent (un peu) le voile au musée Maillol. Les Borgia et leur temps.

Après les Médicis voici une autre famille incontournable de la Renaissance et oh combien sulfureuse. Les Borgia sont les invités du musée Maillol.

Tiziano Vecellio dit Titien LE PAPE ALEXANDRE VI PRÉSENTE JACOPO PESARO À SAINT PIERRE 1502-1510 Huile sur toile - H.147,8 ; L.188,7 cm Anvers, Musée royal des Beaux-Arts © Lukas-Art in Flanders vzw, photo Hugo Maertens
Tiziano Vecellio dit Titien
LE PAPE ALEXANDRE VI PRÉSENTE JACOPO PESARO
À SAINT PIERRE
1502-1510
Huile sur toile – H.147,8 ; L.188,7 cm
Anvers, Musée royal des Beaux-Arts
© Lukas-Art in Flanders vzw, photo Hugo Maertens

La famille Borja, Borgia en version italianisée est originaire du royaume de Valence en Espagne. C’est au milieu du XVème siècle qu’elle commence sa domination sur Rome avec le premier pape de la famille Calixte III qui va fortement aider la carrière de son neveu Rodrigo devient grâce à ce soutien de haut rang archevêque titulaire de Valence, cardinal puis camerlingue et vice-chancelier de l’Église romaine. En 1492, année au combien importante dans l’histoire du monde, qu’il devient pape sous le nom d’Alexandre VI, succédant à Innocent VIII. Alexandre VI est la figure centrale de la famille Borgia et l’une des figures papales les plus sulfureuses. À une époque où l’Eglise doit notamment faire face à la Réforme qui grandit ou aux attaques du dominicain Girolamo Savonarola qui instaure à Florence une république théocratique, le pape est quant à lui non pas fédérateur mais figure controversée qui reconnaît ses enfants et entretien une liaison suivie avec la belle Giulia Farnèse dont le frère sera à son tour pape sous le nom de Paul III.
Le pape sut aussi être un mécène en commandant notamment la décoration des chambres du Vatican à Pinturicchio.

Lucrèce Borgia par Le Pinturicchio, 1492-1494.
Lucrèce Borgia par Le Pinturicchio, 1492-1494.

Les enfants du pape sont aussi à l’honneur dans l’exposition, notamment la belle Lucrèce qui fut certainement la plus érudite et la figure familiale la plus importante pour le monde des arts et des lettres. Elle serait représentée par Pinturricchio sous les traits de sainte Catherine dans l’une des chambres précitées.  Elle avait la réputation d’être d’une grande beauté mais il n’existe aucun portrait la représentant de manière irréfutable, tout n’est que supposition.

Elle sera surtout un instrument politique dans les mains de son père qui la maria et la démaria au grès des alliances de pouvoir avec Giovanni Sforza, Alfonse d’Aragon et enfin Alfonse d’Este, duc de Ferrare. C’est auprès de ce dernier qu’elle s’épanouira vraiment en devenant la protectrice des arts.

Une véritable aura de mystères va au fil des siècles se tisser autours de Lucrèce. On lui prêtera des relations incestueuses, des mœurs dissolues et mêmes des talents d’empoisonneuse. Elle inspirera ainsi la littérature puis plus tard le théâtre et le cinéma. Citons par exemple Victor Hugo, Mérimée, le film de Christian-Jaque ou encore les dernières séries tv.

Altobello Melone PORTRAIT DE GENTILHOMME (CÉSAR BORGIA?) 1513 Huile sur bois H.58,1 ; L.48,2 cm Bergame, Accademia Carrara di Bergamo © Archivio fotografi co Accademia Carrara
Altobello Melone
PORTRAIT DE GENTILHOMME
(CÉSAR BORGIA?)
1513
Huile sur bois
H.58,1 ; L.48,2 cm
Bergame, Accademia Carrara di Bergamo
© Archivio fotografi co Accademia Carrara

Son frère aussi passionna les artistes. César Borgia qui inspira à Machiavel l’image du prince tyran. Homme d’église, jeune cardinal, il abandonna dès qu’il le put l’habit de religieux pour l’armure du soldat. Militaire et stratège de génie, il sut s’entourer du meilleur pour réaliser des engins de siège et des cartes, Leonardo Da Vinci. Duc de Valentinois grâce à son alliance avec Louis XII, César va participer aux premières guerres d’Italie en étant notamment nommé gonfalonier de l’armée papale. Mais la mort de son père va vite signer son déclin. Le pape Jules II, Giuliano della Rovere est un ennemi de la famille Borgia et va tout faire pour affaiblir César. Après moult péripéties, il meurt à 31 ans dans une embuscade en 1507.

On comprend que cette famille ai fasciné et fascine toujours ceux qui s’en approchent, la vie de ses membres fut riches en rebondissement dramatiques, en proie avec les luttes pour le pouvoir et la gloire, pleine de trahison, de complot et d’amour.

Pourtant je dois l’avouer avoir été un peu déçue par l’exposition. Je m’attendais à une profusion d’œuvres comme celle consacrée aux Médicis, mais à part quelques belles pièces, il y a assez peu de matière. On commence avec des portraits des différents membres de la famille, un bref historique, on peut voir un très beau Titien de début de carrière, prêté par le musée d’Angers ou le portrait présumé de César Borgia par Altobello Melone vers 1510 qui est d’une grande beauté, très moderne dans son exécution avec ce fond orageux brossé sur lequel se détache le visage déterminé au regard fuyant et au poing serré sur l’épée d’un jeune brun.

Michelangelo Buonarroti dit Michel-Ange (Attribué à) PIÉTA Dernière décennie du XVe siècle Terre cuite H.45 ; L.58 cm Collection privée © D.R.
Michelangelo Buonarroti dit Michel-Ange (Attribué à)
PIÉTA
Dernière décennie du XVe siècle
Terre cuite
H.45 ; L.58 cm
Collection privée
© D.R.

Ensuite c’est le contexte historique, religieux et militaire qui est évoqué par des armes, une esquisse de Leonardo da Vinci représentant peut-être César, ou le célèbre portrait par Cranach de Luther et de son épouse et celui d’Erasme par Quentin Metsys.
Au second étage c’est l’influence des Borgia sur les arts de leur époque et des siècles suivants qui est évoqué. Et là je dois bien l’avouer, deux œuvres attribuées à Michelangelo se démarquent très nettement : un très beau Christ en croix taillé dans du bois polychrome et une Piéta en terre cuite, étude présumée de la célèbre Piéta qui est aujourd’hui à Saint-Pierre de Rome. Le premier est très fin, tout délicat avec ses petits muscles bien saillants ; la seconde longtemps considérée comme une sculpture du XVIIème a finalement vieilli de 2 siècles et serait une première version avec un petit cupidon qui soutient le bras gauche du Christ, référence au courant néoplatonicien auquel adhérait Michelangelo.

Andrea del Verrochio SAINT JÉRÔME Vers 1465 Huile sur papier maroufl é sur bois H.40,5 ; L.27 cm Florence, Palazzo Pitti © Su concessione della SSPSAE e per il Polo Museale della città di Firenze
Andrea del Verrochio
SAINT JÉRÔME
Vers 1465
Huile sur papier maroufl é sur bois
H.40,5 ; L.27 cm
Florence, Palazzo Pitti
© Su concessione della SSPSAE e per il Polo Museale della città di Firenze

Parmi les autres œuvres on peut aussi citer L’Enfant Jésus « aux mains » de Pinturicchio dont la Vierge disparue aujourd’hui représentait la maitresse d’Alexandre VI, Giulia Farnèse ; un saint Jérôme de Verrocchio, un saint Georges de Mantegna, une transfiguration de Giovanni Bellini ou même un Reliquaire des cheveux de Lucrèce Borgia et les costumes de la série de Canal +. Il y a donc de quoi se satisfaire, mais je reste tout de même sur ma faim et j’attends désormais avec impatience une autre famille, anglaise cette fois-ci. Les Tudors se préparent à envahir le musée du Luxembourg J

Les Borgia et leur temps, jusqu’au 15 Février, musée Maillol.
SCÉNOGRAPHE HUBERT LE GALL
COMMISSARIAT
CLAUDIO STRINATI Historien de l’art

L’hymne à la vie des étrusques à découvrir au musée Maillol

Tête masculine fin du VIIe siècle avant J.-C. Bois avec traces d’or − H. 21,3 cm Milan, Museo Civico Archeologico © Civico Museo Archeologico di Milano / Giudici Giuseppe
Tête masculine
fin du VIIe siècle avant J.-C.
Bois avec traces d’or − H. 21,3 cm
Milan, Museo Civico Archeologico
© Civico Museo Archeologico di Milano / Giudici Giuseppe

Nous voici donc plongé dans une civilisation toujours entourée de mystères malgré les nombreuses découvertes et études qui lui sont dédiées. Nous voici chez les étrusques, invités cette saison au toujours accueillant musée Maillol.
Je ne sais pas si vous vous en rappelez mais il y a peu, la Pinacothèque avait déjà proposé une exposition Giacometti et les Etrusques dont je vous avais parlé (cf. https://museis.wordpress.com/2011/10/20/giacometti-et-les-etrusques/). Je vais donc faire court pour ne pas me répéter. Pourtant les deux expositions sont très différentes l’une de l’autre, en dehors de l’aspect comparatif avec un artiste contemporain et la muséographie en tant que telle. Là où la Pinacothèque dégageait un particularisme de l’art étrusque à travers l’art funéraire et ses figures allongées, le musée Maillol va plus loin.

Tombe du Navire 470 avant J.-C. Peintures transposées sur toile − H. 2,46; L.4,80; l. 3,50 m Tarquinia, Museo Archeologico Nazionale Tarquiniense © Su concessione della S.B.A.E.M - Museo Archeologico Nazionale Tarquiniense, Tarquinia
Tombe du Navire
470 avant J.-C.
Peintures transposées sur toile − H. 2,46; L.4,80; l. 3,50 m
Tarquinia, Museo Archeologico Nazionale Tarquiniense
© Su concessione della S.B.A.E.M – Museo Archeologico Nazionale Tarquiniense, Tarquinia

Bien qu’il commence par une évocation du matériel archéologique funéraire, notamment ces urnes-cabanes retrouvées dans les tombes et qui donnent une idée de l’habitat étrusques disparus ; il va plus loin. Le titre même en est la preuve, « un hymne à la vie ». Ici c’est le quotidien des étrusques que l’on cherche à approcher, eux qui étaient connus pour être de bons vivants. On découvre aussi une riche civilisation de marchants qui régna sur l’Italie entre les IXème et Ier siècles avant JC, qui échangea beaucoup avec la Grèce comme en prouve son art, avant de disparaître par la conquête romaine, tout en subsistant à travers de nombreuses traditions. Les romains héritèrent entre autres choses du temple étrusque, de l’art des aruspices, ou encore de la religion avec la triade capitoline.

Statuette d’haruspice IIIe siècle avant J.-C. Bronze fondu − H. 34 cm Rome, Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia © Su concessione della S.B.A.E.M. - Museo di Villa Giulia, Rome / Fabio Barbieri
Statuette d’haruspice
IIIe siècle avant J.-C.
Bronze fondu − H. 34 cm
Rome, Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia
© Su concessione della S.B.A.E.M. – Museo di Villa Giulia, Rome / Fabio Barbieri

Le monde étrusque était  principalement organisé autour d’une Dodécapole, une alliance  (fragile) politique, religieuse et économiques de 12 citées dont Véies, Cisra, Tarquinia, Vulci, Rusellae, Vetulonia, Populonia, Velzna, Clusium, Perusia, Arretium et Volterrae.
L’exposition donne un aperçu de ces cités, les lucumonies à travers divers aspects : l’architecture, l’art funéraire, l’écriture…
Parlons-en de l’écriture, de cette langue autour de laquelle planent tant de mystères. Même si l’alphabet est inspiré du grec, le sens général des mots est souvent difficile à comprendre car personne n’en a encore trouvé la clef. Tout ce que l’on sait, c’est qu’elle est non indo-européenne, faisant planer un doute sur l’origine de ce peuple.
Le second étage est celui des petites merveilles. Ici sont abordés différents aspects de la vie quotidienne qui font des étrusques un peuple à part : religion, banquet, militaire, art, sport, érotisme. La religion d’abord. Tite-Live disait que «l’Étrurie […] tenait plus que toute autre nation à l’observation des rites religieux ». C’est une mythologie de la révélation, celle faite aux hommes par la nymphe Végoia et le génie Tagès. On retrouve ainsi plusieurs divinités liées ou non aux divinités latines et grecques : Tinia (Jupiter), Menrva (qui donnera Minerve)…

Statue féminine 590-580 avant J.-C. gypse, h. 85 cm Londres, British Museum ©The British Museum, Londres, Dist. RMN-Grand Palais The Trustees of the British Museum crédit musée maillol
Statue féminine 590-580 avt J.-C.
gypse, h. Londres, British Museum
©The British Museum, Londres, Dist. RMN-GP
crédit musée maillol

Le rôle de la femme est aussi longuement abordé. Á travers les bijoux d’une part. Admirez ce superbe fermoir de vêtement en or à décor d’animaux d’une délicatesse majestueuse, ou cet éventail de bronze.  Après les portraits sont moins flatteurs, mais la statuaire étrusque est assez éloignée des codes grecques. Elle est plus formelle, dans une schématisation touchante, avec ces délicats sourires qui ornent les visages et qui rappellent certaines korés archaïques. Au passage, vous ne pouvez pas ne pas vous arrêtez devant cette tête en bois du VIIème siècle avant notre ère autrefois recouverte d’or et à l’expression si troublante. Mais je reviens à mes femmes, car elles ont durant toute l’Antiquité trainé une sacré réputation : dévergondés, grande buveuse, dépravée, prostituée et j’en passe, je vous renvoie à Aristote ou Diodore de Sicile. Ceci probablement pour l’unique raison que dans la société étrusque la femme bénéficie de droits civiques bien plus importants que ces voisines. Elle peut par exemple participer au banquet, rite sociale très important de la société étrusque. On voit d’ailleurs l’évolution des codes de ce dernier, d’abord assis comme chez Homère puis allongé de par l’influence orientale à la fin du VIIème siècle avt JC.
Pour revenir à mes moutons, le rôle des femmes et de leurs réputations est aussi une occasion pour exposer trois œuvres sulfureuses avec avertissement parental qui évoquent la réputation de ces gens très portés sur la chose et toute ses variétés. Alors même si ces messieurs gloussaient devant la vitrine, pour ceux qui ont parcouru l’exposition Pompéi, on en a vu d’autre, rappelez-vous le magnifique phallus aillé. Même si je dois avouer que le stamnos à représentation ithyphallique (ça fait plus savant comme mot) m’a bien amusé en l’imaginant dans une situation contemporaine du style « tenez belle-maman encore un peu de vin peut-être ?… »

Fermoir de vêtement, décoré de figures d’animaux 680-650 avant J.-C. Or − H.10 ; L. 17 cm – Rome, Museo di Villa Giulia ©Su concessione della S.B.A.E.M. - Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia, Rome
Fermoir de vêtement, décoré de figures d’animaux
680-650 avant J.-C.
Or − H.10 ; L. 17 cm – Rome, Museo di Villa Giulia
©Su concessione della S.B.A.E.M. – Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia, Rome

Enfin, pour conclure une très belle exposition, plein de beaux objets qui nous permettent encore une fois d’admirer cette civilisation pré-romaine fascinante. Les œuvres présentées sont de qualités, notamment tous ces vases à figures noires (bucchero nero). Les Etrusques n’ont décidément pas fini de nous surprendre. Après le choix d’une muséographie thématique et non chronologique est à débattre. Moi cela ne me dérange pas, même si du coup on se perd dans les différents styles mais la petite plaquette explicative est là pour vous faire réviser votre histoire étrusques, ou plutôt pour vous l’enseigner car après deux expositions en si peu de temps, ce peuple reste encore à découvrir.

 en bonus une oeuvre qui je trouve résume bien l’art étrusque qui respire la bonne humeur : 

oenochoé première moitié du VIe siècle avant J.-C. Bucchero − H. 41,5 cm Florence, Museo Nazionale Archeologico © Su concessione della Soprintendenza per i Beni Archeologici della Toscana / Antonio Quattrone
oenochoé
1ere moitié du VIe siècle avant J.c
Florence, Museo Nazionale Archeologico
© Su concessione della soprintendenza per i Beni Archeologici della Toscana / Antonio Quattrone


Etrusque un hymne à la vie.

Musée Maillol
18 septembre-19 février 2014.

 

Commissariat :
Anna Maria Moretti SGUBINI : Surintendante honoraire per i Beni Archeologici dell’Etruria meridionale
Francesca Boitani : Directrice honoraire del Museo Nazionale Etrusco di Villa Giulia, Rome

http://www.museemaillol.com/expositions/etrusques/presentation/

Retour sous le ciel de Venise : Canaletto au musée Maillol

Pour ne pas être trop dépaysée, j’ai décidé de faire tout de suite la seconde exposition consacrée à Canaletto, histoire de bien mettre les deux en perspective. Nous revoici donc dans la Venise du XVIIIème siècle sublimée et à explorée à travers une cinquantaine de toiles, montez sur votre gondole et c’est parti.

L’ingresso al Canal Grande, dalla Piazzetta, 1730
Grande-Bretagne, Knutsford, The Egerton of Tatton Park© NTPL/John Bethell

Cette exposition se veut plus monographique que celle de Jacquemart-André (voir article : https://museis.wordpress.com/2012/09/21/premiere-escale-a-venise-au-musee-jacquemart-andre-canaletto-et-guardi/). Le contexte historique et artistique est un peu mis de côté au profit d’un appondissent de l’œuvre de Canaletto et de sa technique. Ici, la ville de Venise est aussi d’avantage mise en avant par une muséographie très élégante où des pontons de bois clairs longent les murs, des arcades sont recrées sous lesquelles on peut « feuilleter » virtuellement  un carnet de croquis exceptionnel, le nom des places est inscrit aux angles des murs et des petits textes explicatifs sur la ville elle-même en lien avec les œuvres de Canaletto nous permettent de mieux visiter la ville.

Capriccio col Ponte di Rialto secondo il progetto del Palladio, la Basilica di San Marco e uno scorcio di Palazzo Chiericati a Vicenza
V. 1745. Parme, Galleria Nazionale

On découvre donc un peu mieux l’artiste. Notamment sa jeunesse auprès de son père, artiste reconnu de décors de théâtre, ses débuts en tant que védutistes vers 1720, son style qui évolue vers plus de minutie et toujours ses sublimes caprices qui nous montre Venise telle qu’elle aurait pu être. On se rend compte aussi du succès de Canaletto à travers l’Europe, de par ses commandes d’anglais comme celles du Premier Ministre Robert Walpole, ou les ducs de Marlborough et Bedford. Succès concrétisé par un séjour à Londres (1744-1755) où une cinquantaine de vedute sont peintes par cet artiste à la réputation extravagante d’homme avide changeant les prix des commandes selon son bon vouloir grâce à sa célébrité.

La chiesa di San Giovanni dei Battuti a Murano, con Venezia nel fondo, 1724-1725 environ
Saint-Pétersbourg, Musée d’Etat de l’Ermitage
© The State Ermitage Museum/Vladimir Terebenin, Ltonard Kheifets, Yuri Molodkovets

En dehors des collections anglaises, on découvre aussi les collections russes. L’œuvre de Canaletto a su plaire jusqu’aux confins de l’Europe comme en témoignent les prêts consentis par l’Hermitage et le musée Pouchkine. Bien que n’ayant  jamais exercé directement en Russie, le peintre a eu une grande influence au point que la noblesse russe commandait des œuvres « à la manière de », des vues de Venise mais aussi de Saint-Pétersbourg. Il marqua notamment Fedor Alekseev (1753-1824), le “Canaletto russe”.

L’Eglise Santa Marta à l’extrémité de la lagune (recto), vers 1758, plume et encre brune sur des traces de crayon, papier blanc. Crédits Venezia Collezione privata – Courtesy of Damiano Lapiccirella

Dans cette exposition, c’est surtout l’étude pratique du travail de Canaletto qui offre un intérêt inédit , notamment à travers l’exposition du carnet de croquis dont certains feuillets sont visibles et qu’on peut feuilleter virtuellement. Il s’agit d’un objet unique dans l’art vénitien de cette époque qui a été très peu montré jusqu’à présent. Il permet de rentrer dans le travail préparatoire de Canaletto, ses observations, ses dessins à la plume et ses annotations. Mais surtout ce carnet a permis de rentrer contextuellement dans le travail de l’artiste, dans sa méthode, car son étude a permis de voir que Canaletto utilisait une chambre optique (camera obscura), reconstituée dans l’exposition. Alors une chambre optique Quesque c’est ? C’est un instrument qu’il embarquait avec lui sur les barques, on se met dos au sujet, sous un drap noir, comme les vieux appareils photos et par un jeu de miroir, le sujet choisi est capté par une lentille qui le recréé sur un plan de travail dans la chambre et Canaletto n’a qu’a retracé ce qu’il aperçoit sur son carnet. La Camera Obscura permet au peintre de mieux travailler sa perspective en réagençant  l’ensemble pour qu’il semble le plus réel possible et créé de véritables panoramas. Être védutiste c’est être un peu mathématicien !

La Scala dei Giganti in Palazzo Ducale, 1755-1756
Grande Bretagne/ Alnwick, Collection of the Duke of
Northumberland, © Collection of the Duke of Northumberland

En tout cas, encore une fois, je dois admettre avoir été charmée par son oeuvre et le succès de l’artiste en son temps apparait comme tout à fait compréhensible. En dehors du rendu de la ville en elle-même, du tracé des lignes, et du travail sur la lumière et l’atmosphère, qui sont magnifiques en soit, c’est aussi la vie qu’il insuffle à ses toiles qu’il est intéressant de pouvoir approcher. Plein de petits personnages peuplent les toiles de Canaletto. Réduits à de simples touches de peintures colorées, sans plus de détails, ils n’en semblent pas moins vivants. On les entendrait presque parler, chanter, se dire des choses banales de la vie. Ces toiles sont bruyantes de vie.

Il molo dal bacino di San Marco, 1740-1745
Milan, Pinacoteca di Brera
© Su concessione del Ministero per i Beni e le Attività Culturali

En conclusion, je dirais que les deux expositions sont complémentaires et on ne perd absolument pas son temps à voir les deux, étant donné la qualité des œuvres exposées qui invitent aux voyages et au rêve de lagune. Toutefois, si vraiment vous ne désirez qu’en voir qu’une parce que ça coûte un peu cher tout de même (11€), peut-être alors que celle de J-A serait mon conseil, pour sa rigueur d’une part et parce qu’elle offre un tour d’horizon plus large et permet d’avantage de replacer Canaletto dans son époque et surtout d’appréhender le genre même de la veduta dans un plus vaste ensemble avec la confrontation avec Guardi. Mais si vous êtes un admirateur absolu de Canaletto, alors celle de Maillol est celle qu’il vous faut, ne serait-ce que pour Festa notturna alla chiesa di San Pietro in Castello, une vue de nuit absolument magique et rare, pleine d’étoiles et de la beauté d’une nuit chaude de Vénétie. Cette œuvre en elle seule vaut le déplacement même si la photo ne rend pas du tout, mais alors pas du tout, la beauté de ce tableau.

Festa notturna alla chiesa di San Pietro in
Castello
Fête de nuit à l’église San Pietro in
Castello
1745 environ
Londres, collection Gert-Rudolf Flick

Musée Maillol

Commissaire : Annalisa Scarpa

19 septembre 2012 au 10 février 2013.

61 Rue de Grenelle  75007 Paris. Horaires d’ouverture tous les jours de 10h30 à 19h00 et nocturne le vendredi.

ARTEMISIA, pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre

Je vous invite à découvrir au musée Maillol une femme d’exception doublée d’une grande artiste. Une femme tellement exceptionnelle que sa vie a longtemps éclipsé son art à l’image d’un Caravage dont elle est très proche  artistiquement parlant. Cette femme c’est Artemisia Gentileschi (1593-1654).

Cette exposition, première en France sur cette artiste, a le mérite de la remettre dans la lumière. Pas seulement sa vie qui ressemble à un véritable roman mais ses peintures et son talent précoce reconnu par ses pairs.
D’ailleurs, le parcours prend le parti de ne pas suivre strictement une chronologie biographique. Il commence par la fin, lorsqu’Artemisia est au sommet de son art, histoire de bien voir à qui on a à faire, avant de rentrer dans les détails d’une existence houleuse d’une peintre dans l’Italie du XVIIe siècle où une femme n’est jamais considérée comme une adulte mais qui a force de génie et de caractère a su conquérir sa gloire.

Pour une meilleure cohérence du récit, je vais moi, garder le fil chronologique et donc commencer par le second étage, mais si vous visitez l’expo, restez sur le parcours sinon ça risque de vous emmêler un peu les pinceaux.

Orazio Gentileschi, Sybille
Houston, Museum of Fine Arts

Artemisia est née en 1593 dans la ville éternelle, Rome où sa carrière débute très tôt. Elle est la fille d’Orazio Gentileschi, peintre toscan et disciple de Caravage très apprécié en cette fin de siècle. Le père va apprendre la peinture à sa fille. Elle est son assistante, son élève et aussi son modèle. Car depuis quelques années il est interdit à un peintre de faire poser nue un modèle et certains critiques supposent qu’Orazio a subtilement contourné cette interdiction en utilisant sa fille, moins onéreuse qu’une prostituée. En tant que femme peintre, cette dernière contourne également la règle en étant son propre modèle ce qui donne à ses œuvres une féminité et une sensualité presque inédite dans la production de l’époque et ce qui contribue à son succès. Artemisia peint des femmes, des héroïnes qui ont souvent ses traits et qui témoignent toutes d’une force intérieure toujours très intense rendue par un clair-obscur parfaitement maitrisé.
Très tôt, elle se montre douée pour cet art. Elle a un don. La première œuvre signée d’Artemisia date seulement de 1610, elle n’a que 17ans quand elle peint Suzanne et les vieillards (collection Schönborn, Pommersfelden), déjà une héroïne. Deux œuvres de son père sont exposées. Une Sybille et un Saint Jérôme  qui témoignent malgré le lien évident, la distance que va prendre très vite Artemisia par rapport au style de son père.

Suzanne et les vieillards, 1610, collection Schönborn, Pommersfelden

1611 et 1612 marquent le tournant de la vie d’Artemisia, un tournant dramatique qui va marquer à la fois son existence, sa postérité et surtout  son œuvre. Elle se fait violer par son précepteur qui est aussi l’assistant d’Orazio, Agostino Tassi. L’homme la pousse même à entretenir pendant plusieurs mois une liaison, lui promettant le mariage qui lui garantirait à la fois un honneur sauf mais surtout de pouvoir continuer à peindre. Une femme en effet pour exercer un métier artistique doit avoir l’autorisation d’un mari qui a la même profession, sans cela, elle ne peut ni signer de contrats, ni acheter des couleurs ni même voyager. Seulement voilà Tassi ne peut pas épouser Artemisia, il est déjà marié ! Orazio intente alors un procès à ce dernier pour réparer le dommage fait à sa fille (et un peu à lui-même faut pas l’oublier), procès qui va être une douloureuse épreuve pour Artemisia. Elle doit entre- autres horreurs subir la question pour prouver qu’elle ne ment pas. Finalement Tassi est condamné aux galères et à l’exil, quant à Artemisia, elle épouse un modeste peintre, Pierantonio Stiattesi qui lui permet de continuer d’exercer ce pourquoi elle est née : la peinture.

Judith et la servante avec la tête d’Holopherne
1617-18
Florence, Galleria Palatina
© Studio Fotografico Perotti, Milano/Su concessione del
Ministero per i Beni e le Attività Culturali

A partir de là, la carrière de la jeune femme décolle. Elle part notamment pour Florence entre 1613 et 1620, pour travailler à la cour du Grand-Duc  et de la duchesse de Toscane, Cosme II  de Médicis et Catherine de Lorraine, elle devient également proche de Galilée. C’est là qu’elle gagne vraiment son indépendance en devenant grâce à son talent et ses relations, la première femme admise à l’Academia del Disegno, à tout juste 23ans. L’Academia, créée en 1563 par Cosme Ier et Vasari a eu pour prestigieux directeurs, Michel Ange, Titien ou le Tintoret. En être membre pour Artemisia c’est avoir un statut social, au même titre qu’un homme, elle peut donc peindre et voyager désormais à sa guise.

Des femmes, encore des femmes, elles sont partout dans son œuvre mais cela est normal car elle ne peut pas faire poser d’hommes. On aperçoit la Vierge Marie, Sainte Catherine d’Alexandrie, Madeleine, Yaël et surtout Judith qu’on retrouve à différents moments de l’exposition.

Judith et Holopherne
c. 1612
Naples, Museo Nazionale di Capodimonte
© Fototeca Soprintendenza per il#PSAE e per il Polo museale
della città di Napoli

Magnifique Judith, figure emblématique de l’Ancien Testament qui trancha la gorge d’Holopherne, général babylonien qui menaçait son peuple, déjà présente chez Le Caravage avec cette même violence. De la période florentine, il y a Judith et sa servante Abra (Palais Pitti, Florence) mais aussi le chef-d’œuvre d’une vie Judith décapitant Holopherne (Galerie des Offices, Florence). Dans ce tableau d’une grande brutalité Judith a comme souvent les traits d’une Artemisia vengeresse et déterminée et Holopherne prend lui le visage de Tassi pendant que le sang coule à flot.
A florence, elle peint aussi, l’Allégorie de l’inclination de la casa Buonarroti. Tâche confiée par le neveu de Michelangelo, qui lui ouvre les portes de la gloire. L’œuvre de la peintre est de plus en plus empreinte de théâtralité, la narration déjà bien présente est accentuée et lui apporte un succès grandissant car l’heure est au goût pour le théâtre.

En parallèle de sa vie d’artiste, sa vie de femme aussi évolue, elle devient notamment mère de 4enfants, dont seule la petite Prudenzia survit et suit même les traces de sa mère. Elle tombe amoureuse aussi, de Francesco Maria Maringhi, l’agent grand-ducal qui l’aide toute sa vie. Des lettres d’amour sont d’ailleurs exposées ici, pour mieux rendre compte de la personnalité d’Artemisia.

Artemisia Gentilsechi, Portrait d’une dame assise, 1620, Genève

La période florentine s’achève par une fuite, ne pouvant pas payer de nombreuses dettes, elle retourne à Rome pour devenir entre 1620 et 1626 le chef de fil caravagesque. Elle est notamment reconnue comme portraitiste, surtout auprès des dames qui osent plus facilement poser sous le regard d’une femme, comme la princesse d’Albano, Caterina Savelli. C’est aussi à cette époque qu’elle fréquente l’atelier de Simon Vouet, dont elle devient l’amie tout en assimilant son style.
Les nus féminins font aussi parti de son art à cette époque, car très demandés pour les chambres de ces riches commanditaires. De nombreux artistes s’y essayent mais c’est Artemisia qui remporte tous les suffrages par sa maitrise parfaite du corps de la femme et de sa sensualité. C’est une beauté naturelle que montre Artemisia, pas une statue idéalisée. Citons Cléopâtre mais surtout  l’huile sur cuivre : Danaé  (The Saint Louis Art Museum).

Après Rome, elle reste quelques temps à Venise puis part pour Naples en 1630 où elle demeure jusqu’à la fin de ses jours à l’exception de deux années passées à Londres à la cour de Charles Ier où elle a rejoint son père mourant en 1638-1640.

Danaë
c.1612
Saint Louis, The Saint Louis Art Museum

Naples c’est l’apothéose de sa carrière Elle travaille notamment au service du vice-roi, le Duc d’Alcalà, l’un de ses grands admirateurs depuis déjà quelques années. Cette période sur laquelle commence l’exposition, est une période de gloire qui dépasse les portes de la ville. Son succès est international. Elle œuvre auprès d’artistes napolitains, dont Massimo Stanzione mais possède également son propre atelier qui accueille des artistes comme Pacecco De Rosa, ou Bernardo Cavallino mais également sa fille Prudenzia. On retrouve dans cette période ses héroïnes, Judith et Abra avec la tête d’Holopherne (Museo Nazionale di Capodimonte), Suzanne et les vieillards (Pinacothèque Nazionale de Bologne) et plusieurs versions de Bethsabée au bain. Cette partie de l’exposition, même quand on n’y connait rien, est intéressante pour vous faire rentrer dans les débats d’attributions par les historiens de l’art. La juxtaposition de plusieurs toiles a ainsi permit des réattributions à Artemisia en raison des proximités stylistique avec son travail, comme pour Samson et Dalila. D’autres ont au contraire été remises en questions.

Bethsabée au bain
c. 1636-39
Londres, Matthiesen Gallery
© The Matthiesen Gallery Londres

« Vous trouverez en moi l’âme de César dans un corps de femme » voilà comment s’est décrite Artemisia. Une femme forte que cette exposition essaye de remettre dans une lumière qu’elle a perdue pendant presque trois siècles. Certes le sujet n’est pas facile, voir ardu, c’est plein de noms d’artistes que 90% de la population ne connait n’y d’Eve ni d’Adam mais justement ça nous cultive un peu. Après c’est vrai, son œuvre est si personnelle qu’on peut ne pas aimer ces gros plans dramatiques en clair-obscur sur ces femmes qui ont toutes ce petit air de famille…mais c’est aussi un destin tellement grand, qu’on ne peut pas ne pas être au moins un petit peu attiré par le personnage. De plus pour ceux qui préfèrent l’art plus contemporains et plus joyeux, au dernier étage, le musée Maillol présente sa collection permanente de Bombois et de Séraphine qui depuis le film a sacrément la côte. Et pour le coup Séraphine/ Artemisia, c’est un parallèle assez audacieux, car la distance entre les deux est énorme à tout point de vue.

Bon je vous laisse avec cette jeune femme pleine de talent que fut Artemisia Gentileschi. Vous pouvez me dire ce que vous en avez pensé aussi.

 

Judith et sa servante Abra avec la tête d’Holopherne (1645-50)

                                                                                                                                                     

Commissariat

Roberto Contini, co-commissaire de l’exposition, conservateur des Peintures espagnoles et italiennes
(XVe-XVIIe siècles) et de la Peinture française (XVIIe siècle) à la Gemäldegalerie de Berlin
Francesco Solinas, co-commissaire de l’exposition, maître de conférences au Collège de France et
directeur scientifique adjoint de la République des Lettres#– Respublica Literaria (CNRS)#

http://www.museemaillol.com/

Échantillon d’expos pour 2012

Voilà 2012 est déjà bien commencée et avec la nouvelle année, plein de nouvelles expositions !
Vu la dose de prévue, je ne fais pas vous faire toute la liste. Je vais juste vous faire ma petite sélection, pour les 6 prochains mois pour la région parisienne et cela sera déjà pas mal du tout ! Surtout qu’étant qu’une petite humaine, salariée, je n’aurai pas le temps de tout faire (ça me rappelle une chanson ça!).

1 ) Pour commencer, les expos toujours en cours (mais que je n’ai pas vu), dans l’ordre chronologique de fin, pour savoir si on est très pressé ou juste un peu :

L’hôtel particulier une ambition parisienne. Cité de l’architecture. Paris. Jusqu’au 19 février.

Si j’arrive à prendre une journée où le musée est ouvert, ça peut être intéressant, d’autant plus que le commissaire est Alexandre Gady, l’un des grands spécialistes du Patrimoine de Paris et accessoirement l’un de mes anciens profs les plus passionnants de la Sorbonne.
http://www.citechaillot.fr/exposition/temporary_exhibitions.php?id=180

Le Siam à Fontainebleau. 150e anniversaire de l’ambassade du roi de Siam reçue par Napoléon III dans la salle de Bal du château de Fontainebleau. Fontainebleau. Jusqu’au 27 février.

http://www.chateau-de-fontainebleau.com/Expositions

Le peuple de Paris au XIXème siècle, des guinguettes aux barricades. Musée Carnavalet, jusqu’au 26 février.

http://carnavalet.paris.fr/fr/expositions/le-peuple-de-paris-au-xixe-siecle

Moi, Sarah Bernhardt. Maxim’s, musée Art Nouveau. Jusqu’au 15 mars

Retour sur l’une des légendes du théâtre, personnalité hors du commun et femme d’exception, à travers des objets lui ayant appartenu, le tout, dans un décor somptueux, chez Pierre Cardin.
J’aimerai bien la faire, mais vu les horaires, le prix et les conditions d’accès, piuf, ça va être compliqué.
http://www.maxims-musee-artnouveau.com/caricature.php

Fantin-Latour, Manet, Baudelaire : L’hommage à Delacroix. Musée Delacroix. Paris. Jusqu’au 19 mars.

L’occasion de mettre enfin les pieds dans ce musée…
http://www.musee-delacroix.fr/fr/les-activites/expositions/nouvelle-exposition-temporaire-fantin-latour-manet-baudelaire-l-hommage-a-delacroix

L’âge d’or hollandais – la collection kremer. Pinacothèque. Paris. Jusqu’au 25 mars 2012.

http://www.pinacotheque.com/fr/accueil/expositions/aujourd-hui/l-age-d-or-hollandais-la-collection-kremer.html?no_cache=1

Sorcières, mythes et réalités. Musée de la Poste, Paris. Jusqu’au 31 mars.

Je dois admettre que le titre m’intrigue. « L’exposition Sorcières, Mythes et réalités aborde la sorcellerie du Moyen-âge à nos jours, suivant des approches artistique, historique et ethnographique. »
http://www.laposte.fr/legroupe/Actualites/Sorcieres-Mythes-et-realites

Rodin, la saisie du modèle. Musée Rodin Paris. Jusqu’au 01 avril.

300 dessins de la dernière période de la vie du grand sculpteur sont présentés, l’occasion de découvrir une autre facette de l’artiste.
http://www.musee-rodin.fr/fr/exposition/la-saisie-du-modele

Exhibition. L’invention du sauvage. Musée du quai Branly. Paris. Jusqu’au 03 juin.

http://www.quaibranly.fr/fr/programmation/expositions/a-l-affiche/exhibitions.html

Présentation du legs Isabella Pakszwer-De Chirico. 61 œuvres de Giorgio de Chirico. Musée d’art moderne de la ville de Paris. Jusqu’en juillet.

http://www.mam.paris.fr/fr/expositions/presentation-du-legs-isabella-pakszwer-de-chirico

Gaulois, une exposition renversante. Cité des sciences. Paris, jusqu’au 2 septembre.

Celle-ci elle a l’air super chouette, l’occasion de (re)découvrir « nos ancêtres les gaulois » comme disait nos anciens professeurs et revenir sur tout plein d’idées reçues.
http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/gaulois/

Les histoires de Babar. Musée des arts décoratifs. Paris. Jusqu’au 2 septembre.

Alors celle-ci, obligé je la fais, retour en enfance, au pays de « bababar, mon copain Baba ».
http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/accueil-292/une-486/francais/arts-decoratifs/expositions-23/actuellement/dans-la-galerie-des-jouets/les-histoires-de-babar/

Il reste bien d’autres expositions encore, Phoebus à Cluny, Pompéi à Maillol ou Alexandre au Louvre…

2 ) Celles à venir, classée de manière anarchique :

Les masques de jade mayas. Pinacothèque. Paris. 26 janvier au 10 octobre.

Après l’or des incas, le jade des mayas! Après avoir été annulée l’année dernière suite aux problèmes politiques entre la France et le Mexique, l’exposition est finalement présentée cette année.
http://www.pinacotheque.com/fr/accueil/expositions/bientot/les-masques-de-jade-mayas.html?no_cache=1

Le crépuscule des pharaons. Chefs-d’œuvre des dernières dynasties égyptiennes. Musée Jacquemard André. Du 23 mars au 23 juillet.

« L’art du dernier millénaire de l’histoire pharaonique (1070-30 avant notre ère) investit le Musée Jacquemart-André. Pour la première fois, une exposition dévoile les trésors de ces dernières dynasties au cours desquelles, au rythme des crises et des invasions, »

Ouh que ça sent l’affluence un titre pareil. Je sens que ça va être drôle, surtout vu la configuration des salles d’expo de J-M.
http://www.musee-jacquemart-andre.com/fr/evenements/crepuscule-pharaons

Les guerres de Napoléon. Louis-François Lejeune, général et peintre (1755-1848). Château de Versailles. 14 février au 13 mai.

http://www.chateauversailles.fr/les-actualites-du-domaine/evenements/evenements/expositions/expositions-a-venir

Louis II de Bavière. Château de Compiègne. 13 avril au 23 juillet.

http://www.musee-chateau-compiegne.fr/homes/home_id24350_u1l2.htm

Cima – Maître de la Renaissance vénitienne. Musée du Luxembourg, Paris. Du 05 avril au 15 juillet.

« Aux côtés de Giovanni Bellini et de Vittore Carpaccio, Giovanni Battista Cima da Conegliano (1459-1517) compte parmi les grands peintres qui travaillent à Venise à la fin du XVe et au début du XVIe siècle, à l’époque où la ville devient un des pôles les plus brillants de la Renaissance italienne. » http://www.museeduluxembourg.fr/fr/expositions/p_exposition-10/

New Frontier : l’art américain entre au Louvre. Thomas Cole et la naissance de la peinture de paysage en Amérique. Musée du Louvre. 14 Janvier 2012 au 16 Avril 2012

http://www.louvre.fr/expositions/new-frontier-lart-americain-entre-au-louvrebr-thomas-cole-et-la-naissance-de-la-peinture

Les belles heures du duc de Berry. Louvre, salle de la Chapelle. 4 avril au 25 juin.

http://www.louvre.fr/expositions/les-belles-heures-du-duc-de-berry

L’ultime chef-d’œuvre de Léonard de Vinci, la Sainte Anne. Louvre. 29 mars au 25 juin.

« Chef-d’œuvre de Léonard de Vinci restauré avec le concours du Centre de recherche et de restauration des musées de France, la Vierge à l’Enfant avec sainte Anne est au cœur d’une exposition exceptionnelle rassemblant pour la première fois l’ensemble des documents liés à ce panneau. »
http://www.louvre.fr/expositions/lultime-chef-doeuvre-de-leonard-de-vinci-la-isainte-annei

Arles. Les fouilles du Rhône. Un fleuve pour mémoire. Louvre.  9 mars au 25 juin.

« En partenariat avec le musée départemental Arles antique, le musée du Louvre présente dans le cadre d’une grande exposition les pièces les plus emblématiques issues du travail minutieux et complexe qu’a représenté la fouille du Rhône, fleuve à la fois sauvage et chargé d’histoire. »

Hiiiii, j’ai hâte, moi qui avais hésité à me payer le billet de train, Arles vient à moi ! J’aime !
http://www.louvre.fr/expositions/arles-les-fouilles-du-rhonebr-un-fleuve-pour-memoire

ARTEMISIA. Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre (1593-1654). Musée Maillol – Fondation Dina Vierny. Paris. 14 mars au 15 juillet.

« Elle est née « Artemisia Gentileschi », fille d’Orazio Gentileschi, l’un des plus grands peintres de la Rome Baroque.
À l’aube du XVIIe siècle en Italie, quand les femmes étaient mineures à vie, quand elles appartenaient à leur père, à leur mari, à leurs frères ou à leurs fils, Artemisia Gentileschi a brisé toutes les lois de la société en n’appartenant qu’à son art. ».

Tim Burton. Cinémathèque française, Paris. 07 mars au 05 aout.

« Dessins, sculptures (dont plusieurs créations inédites de Tim Burton pour l’exposition), des Polaroïds grand format réalisés par l’artiste, accessoires, maquettes, costumes et extraits de films (longs et courts-métrages inédits). »
http://www.cinematheque.fr/fr/expositions-cinema/printemps-2012-tim-burto/

Eugène Atget. Paris. Musée Carnavalet. Paris. Du 18 avril au 29 juillet.

« Découvrez l’œuvre parisienne de l’un des plus célèbres photographes du XXe siècle, Eugène Atget (Libourne, 1857 – Paris, 1927)! Cette exposition, qui réunit des images très connues et d’autres demeurées inédites, dresse un portrait atypique de la capitale, loin des clichés de la Belle époque. »
http://carnavalet.paris.fr/fr/expositions/eugene-atget-paris

La France en relief. Chefs d’œuvres des collections de Louis XIV à Napoléon III. Grand Palais. 18 janvier au 17 février.

« Sous la nef du Grand Palais, la France s’expose en relief.
Autour d’une carte de France de 650 m², seize plans-reliefs conçus du XVIIe au XIXe siècle investissent le prestigieux monument des Champs-Élysées. Des dispositifs interactifs et multimédias alliés à une scénographie originale permettront d’explorer en détail ces maquettes extraordinaires. »
http://www.rmn.fr/francais/les-musees-et-leurs-expositions/grand-palais-nef-522/expositions-523/la-france-en-relief

Helmut Newton. Grand Palais, Paris. 24 mars au 16 juin.

Première rétrospective de ce grand photographe organisée en France, autour de plus de 200 images.
http://www.rmn.fr/francais/les-musees-et-leurs-expositions/grand-palais-galerie-sud-est-554/expositions-555/helmut-newton

La Beauté animale. Grand Palais, Paris. 21 mars au 16 juillet.

« A travers les siècles les plus grands artistes se sont attachés à représenter l’animal, poursuivant une tradition qui n’a cessé de produire des chefs-d’œuvre. L’exposition réunit environ cent trente œuvres de l’art occidental, de la Renaissance à nos jours, de Dürer à Jeff Koons en passant par Rembrandt, Goya, Géricault, Degas, Bonnard, Giacometti ou César »
http://www.rmn.fr/francais/les-musees-et-leurs-expositions/grand-palais-galeries-nationales-9/expositions/beaute-animale

Matisse, paires et séries. Centre Pompidou, Paris. 07 mars au 18 juin.

Certainement la grande exposition monographique de l’année, autour d’un artiste haut en couleurs.
http://www.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-matisse/ENS-matisse.htm

Degas et le nu. Musée d’Orsay, Paris. 08 mars au 01 juillet.

Après Manet et Gérôme, voici la nouvelle exposition monographique du musée d’Orsay autour d’un des grands peintres du XIXème. Après l’exposition de Roubaix, Degas Sculpteur et la grande exposition du Japon en 2010, c’est  la première grande exposition parisienne depuis 1988, sur ce peintre. C’est l’occasion de redécouvrir Degas, autour d’un axe particulier, le nu.
http://www.musee-orsay.fr/index.php?id=649&tx_ttnews%5Btt_news%5D=30632&no_cache=1

Debussy et les arts. Musée de l’orangerie. Paris. 21 février au 16 juin.

« L’exposition propose d’évoquer les rencontres majeures du musicien avec les artistes et poètes de son temps »
http://www.musee-orangerie.fr/homes/home_id25247_u1l2.htm

Bob Dylan, l’explosion rock (1961-1966). Cité de la musique, Paris. 06 mars au 01 juillet.

« Bob Dylan est assurément un des musiciens les plus emblématiques de la seconde moitié du XXe siècle. Dans son parcours d’une exceptionnelle longévité, les années de 1961 à 1966 furent décisives. L’exposition retrace les moments forts de cette période, qui vit Dylan modifier radicalement son approche artistique et susciter une véritable révolution musicale. »
http://www.citedelamusique.fr/francais/evenement.aspx?id=11990

Louis Vuitton-Marc Jacobs. Musée des Arts Décoratifs. Paris. 9mars au 16 septembre.

Voilà une exposition qui devrait satisfaire ces dames et tous ceux qui font la queue devant la boutique des Champs Elysées.

« Cette exposition présente l’histoire de deux personnalités, Louis Vuitton et Marc Jacobs (directeur artistique de la maison Louis Vuitton), et met en évidence leurs contributions à l’univers de la mode. »
http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/mode-et-textile/expositions-70/prochainement-446/louis-vuitton-marc-jacobs/

Patagonie. Images du bout du monde. Musée du quai Branly. Paris. 06 mars au 13 mai.

http://www.quaibranly.fr/fr/programmation/expositions/prochainement/patagonie.html

Phares ! Musée national de la Marine, Paris. 7mars au 04 novembre.

Si vous avez d’autres idées n’hésitez pas à les soumettre en commentaire ou sur le facebook du site.

Et encore bonne année

La plupart des textes viennent directement des sites mentionnés

 Liens :
http://www.moreeuw.com/histoire-art/expositions-paris-2012.htm
http://www.lemondedesarts.com/Exposparisact.htm

Pompéi – Un art de vivre

Pompéi- Un art de Vivre.
Musée Maillol. 22/09/2011-12/02/2012.

Comité Scientifique : Teresa Elena Cinquantaquattro, Surintendante, Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di
Napoli e Pompei, Alain Pasquier, Conservateur général honoraire du Patrimoine
Commissariat de l’exposition : Valeria Sampaolo, Directrice du Museo Archeologico Nazionale di Napoli, Antonio Varone, Directeur des fouilles de Pompéi, Stefano De Caro, Directeur général honoraire du Patrimoine archéologique, Professeur à l’Università Federico II di Napoli
Scénographe : Hubert le Gall

Par ce mardi 01 novembre tout gris, pour une fois, je n’étais pas la seule de repos et donc pas seule et perdue dans une exposition, et ce dans tous les sens du terme.
C’est bien la première fois que je fais la queue pour entrer à Maillol et que l’âge moyen est en dessous des 65ans ; bon en même temps ce n’est que la 3eme ou 4eme que je viens…Surtout le thème de l’exposition est (surtout pour moi qui a un petit, mais tout petit côté monomaniaque de l’Antiquité) plus qu’accrocheur : Pompéi. Juste le nom fait rêver, ville romaine ou un drame absolu à figer le temps il y a 1932ans. J’ai la chance d’avoir visité la ville il y a plusieurs années, c’est un site extraordinaire, mais je suis consciente que tout le monde n’est pas dans ce cas et par cette météo qui vire au gris, pour s’évader en Campanie et faire un bon dans le temps, c’est moins cher qu’un billet d’avion.

Là où l’exposition est réussie, c’est qu’elle ne se contente pas d’affiler plein d’objets sortis des cendres et du tuf, elle offre un angle plus spécifique. Elle aborde la vie quotidienne des romains à travers un parcours qui vous fait visiter une domus pompeiana à travers 200 objets tous plus beaux les uns que les autres venus des fouilles de Pompéi, du musée archéologique de Naples et de l’Antiquarium de Boscoreale. Ce choix est judicieux car c’est la spécificité même des découvertes de Pompéi et Herculanum. On connaissait les monuments publics romains qui ont traversé les siècles : les théâtres et amphithéâtres, les temples, le forum etc. Mais le quotidien même de ces habitants était relativement méconnu et tout d’un coup c’est tout un voile qui se lève pour laisser voir non pas une idée de ce quotidien, mais ce qu’il était le plus exactement possible. De plus, nous ne sommes pas à Rome où les habitants obéissaient à des règles plus strictes, avec les fameuses insulae, qui accueillaient plusieurs familles. Nous sommes dans une ville de Province sans importance politique particulière, une ville prospère de par sa situation géographique, une ville ou l’hellénisme est très présent et où le raffinement et la douceur de vivre définissent un quotidien plus épicurien loin des tracas de Rome.

Avant de commencer la visite de cette domus, un tout petit rappel sur Pompéi et son histoire.
Fondée avant le VIème siècle av. J.C par un regroupement de 5 villages Osques, la ville va être successivement sous l’influence des Grecs, des Etrusques, à nouveau des Grecs et des Samnites.
Elle devient officiellement colonie romaine (colonia Cornelia Veneria Pompeianorum) par la volonté de Sylla en 80 av. J.C.
En 62 de notre ère, la ville subit un tremblement de terre important qui détruit de nombreux monuments qu’on commence à restaurer. Suétone en mentionne un autre plus faible en 65 alors que Néron était en pleine représentation théatrale. 5ans plus tard, des secousses telluriques font fuir une partie de la population, et en 79, sous le règne de Titus le Vésuve entre en éruption et crache ses entrailles sur la baie de Naples.

Joseph Wright of Derby, Eruption du Vesuve, vue de Portici, 1774-1776

Traditionnellement, on situe l’éruption les 24 et 25 août 79, mais des découvertes récentes la placeraient plutôt au début de l’Automne. Grâce aux fouilles et à Pline Le Jeune qui observait la scène depuis Misène, des siècles plus tard nous pouvons nous faire une idée précise des évènements : pendant près de 20h une pluie de pierre ponce s’est abattue sur les environs puis les nuées ardentes de près de 350° ont tout recouvert et anéanties toutes traces de vie. Même si il est difficile d’estimer le nombre de morts, par rapport aux nombres d’habitants, c’est probablement 30 000 victimes qui ont péris à Pompéi, Herculanum, Oplontis et Strabie. Il est important de se rappeler que ce miracle archéologique est avant tout une terrible catastrophe qui a profondément marqué son époque.

Suite à cela, la ville s’est retrouvée comme endormie, enfouie et cachée à la vue de tous, elle en est même oubliée.
Sans raconter en détails les découvertes ce qui ferait un article très très long, voici un petit résumé :
Même si des découvertes fortuites ont été faites avant, c’est surtout au XVIIIème siècle que la ville va lentement émergée et revoir le soleil. Oh bien sûre, ce n’est pas tout de suite un consciencieux travail archéologique qui se met en place. Le comte d’Elbeuf qui découvre Herculanum en 1719 où il a une villa, est certes un amateur d’histoire mais est bien plus intéresser par trouver de beaux objets pour son trésor personnel. Les fouilles officielles commencent en 1748 par la volonté de Charles III de Bourbon et ce n’est qu’en 1763 que les découvertes permettent enfin de mettre un nom sur le site : « Pompéi ».

moulage de chien. © Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei/Fotografica Foglia

Au XIXème siècle, le directeur des fouilles Giuseppe Fiorelli, nommé en 1863 par Victor-Emmanuel II va donner un nouvel essor aux travaux qui deviennent plus méthodiques. Il fait éloigner les décombres, protéger les décombres, procéder au dégagement des demeures par le toit et non plus par des tunnels qu’on creusait à tout va. Il met en place une dénomination castrale unique à tous les édifices et un véritable relevé topographique : les fouilles sont désormais un instrument de connaissance. C’est lui aussi qui en coulant du plâtre dans les vides des couches de pierres ponces et de cendres de corps figés, permit de les sauvegarder et d’avoir ces images saisissantes et figées. « Fiorelli, tu as mis à jour la douleur et nul homme ne peut ne pas la ressentir » disait Luigi Settembrini. Cela résume parfaitement ce que l’on peut ressentir devant ces formes crispées de douleurs qui ont été un jour des êtres vivants comme nous. L’exposition en montre dès le début, un moulage de deux corps serrés l’un contre l’autre. La tête de l’un posée sur la poitrine de l’autre ; et il y a ce chien, improbablement contorsionné. Il le faut le voir pour comprendre.
Aujourd’hui on estime à 44hectares la superficie étudiée sur les 66 que compte le site. Les autorités pensent sérieusement à en laisser une partie

La maison des Gladiateurs effondrée.

enfouie pour la préserver pour les prochaines générations, d’autant plus que sauvegarder toute cette ville est un travail titanesque et couteux. A la merci de intempéries, du climat et des touristes, la ville est plus fragile que jamais et l’écroulement de la maison des gladiateurs et du mur de la maison du Moraliste en 2010, ainsi qu’un mur d’enceinte en octobre dernier.

Mais revenons à l’exposition. Déjà la domus, mais qu’est-ce donc ? C’est la maison familiale, dont le chef de famille est le dominus. Ceux qui regardent la série Rome, on peut être remarqué qu’Attia est appelé domina par ses esclaves. Les maisons pompéines sont sur un ou deux étages, mais pas plus, je vous l’ai dit, nous ne sommes pas dans la promiscuité de la capitale. L’intimité n’en est pas pour autant de mise, surtout dans les grandes propriétés où les esclaves sont nombreux. Elle n’a pas de contacts avec la rue, dans le sens où elle est tournée sur elle-même. Les parties tournées sur la rue sont réservées aux échoppes (tabernae). Pour autant la notion de privée, n’est pas tout à fait la même que la nôtre. La maison est en partie publique. La domus doit refléter le statut social et le prestige de son propriétaire qui y reçoit sa clientèle et qui y travaille.

Plan d’une domus type

A l’origine, elles sont ovales, comme la cabane de Romulus, puis avec l’influence étrusque, le plan devient rectangulaire et l’atrium en devient son cœur et le lieu d’accueil. Certains linguistes pensent qu’étymologiquement atrium vient de atrum, noir car c’est là que se situait le foyer et qu’on prenait les repas et que de fait les murs étaient noirs. Une ouverture dans le toit, le compluvium apporte la lumière et la pluie qui est recueillie dans un petit bassin, l’impluvium. Le lararum, le coffre-fort ou le mobilier de marbre sont un symbole du statut social.

coffre de bronze © Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei/Archivio dell’Arte/Luciano Pedicini

Un petit mot sur les divinités domestiques. La religion fait partie intégrante du quotidien d’un romain. Chaque famille en plus des dieux de la ville ou de l’Empire, honore ses propres divinités qui sont les lares, les pénates et les génies.

Laraire de la maison du Poète

Le lare est une divinité protectrice du terroir sur lequel vit la famille. Son culte est donc l’affaire de tous les habitants de la domus, c’est-à-dire la famille et les esclaves. Depuis le début de l’Empire il est représenté en jeune danseur avec une corne d’abondance, un rhyton ou une patera.
Le génie du paterfamilias est lui la personnification de la puissance d’une personne ou d’un lieu représenté souvent en serpent.
Enfin les pénates, les divinités certainement les plus anciennes sont des dieux adorés par la famille comme Mercure, Vesta ou Vénus. Ils sont protecteurs du foyer, des biens et du feu et sont héréditaires A la différence des autres, on peut les emporter avec soi en voyage. Ainsi Enée en quittant Troie a emporté ceux de sa famille et selon la légende c’est là leur origine.

Fresque de laraire (Terzigno) H. 210 ; L. 260 cm Inv. 86755 Fouilles de Pompéi (Antiquarium de Boscoreale)

Le lararium qui les abrite est une niche ou une petite chapelle parfois décorée où se déroule l’essentiel du culte domestique. Il peut y avoir aussi des laraires mineurs, comme dans la cuisine, qui ne sont que des édicules peints.

trois divinités dans des médaillons

Le triclinium, est également un lieu de représentation sociale où la symbolique est très forte. Le mot vient du fait qu’il y avait 3 couchettes (clena) dedans et la façon de s’y installer était liée au statut (épouse, invité, maître..). La décoration peut évoquer la pièce en elle-même, la mythologie et parfois rappeler le cosmos. Une multitude d’objets ont été retrouvés et nous permettent de nous représenter clairement un triclinium pompéien :

OEnochoé . Ier siècle après J.-C. d’Herculanum, réserves archéologiques © Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei

des pieds de lits triclinaires, des tables, de la vaisselle en bronze, argent, terre-cuite et verre. Les « esclaves muets » sont particulièrement représentatifs d’un certain raffinement, ce sont des petites sculptures de bronze, copies de sculpture grecs qui portent la lumière ou des plateaux.
C’est là que se passe la cena, le repas le plus important, qui débute vers 15h et qui est une tradition de partage de nourriture et de boisson héritée des banquets grecs. Cela commence par le gustacio (hors-d’œuvre, souvent des œufs), puis une série de plats (prima mensa) et enfin les desserts (secunda mensa), le tout parfois accompagné de danseurs et musiciens et bien sûr de vin.
En raison du beau temps, on trouve également un triclinium d’été donnant directement sur le péristyle.

Èphèbe © Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei/Archivio dell’Arte/Luciano Pedicini

La cuisine (culina) où ces plats sont préparés est d’ordinaire une petite pièce. Elle consiste le plus généralement en un comptoir maçonné où brulent un ou plusieurs feux avec une niche dans sa partie inférieure pour y stocker le combustible. Les ustensiles qui composent la culina peuvent être d’un grand raffinement comme cette balance à plateau où pendouille une petite tête finement exécutée. Ils sont aussi d’une grande modernité. Ils aiment les aliments bouillis et fritures, le grill ou la poêle à frire rappellent les nôtres et nous rendent leurs utilisateurs d’autant plus proches. Pompéi en ce sens a permis une avancé des connaissances, car même si on connaissait quelques recettes grâce à Pline le Jeune, Sénèque et surtout Apicus, là ce sont les plats eux-mêmes qui prennent forme devant nos yeux, sans parler des mosaïques et des fresques qui représentent les mets préférés des habitants. Ils mangeaient beaucoup de viande, du poulet, de l’oie, de porc et pour les plus riches du flamand rose, par contre pas de bovins réservés au travail des champs. Le pain faisait également partie de l’alimentation et il y en avait de toutes sortes. Ils y avaient également beaucoup de légumes, de fruits, notamment le raisin. Le garum, sauce à base de poisson fermenté, accompagnait la plupart des mets. Le miel était également très apprécié, pour conserver les aliments entre autre.
Ils prenaient 3 repas par jours : le jentuculum, le matin avec pain ou biscuit trempé dans du lait ou de l’eau, du fromage ou les restes de la veille ; le midi, un repas léger souvent pris dans les « bistrots » et le soir la coena.

Passons maintenant à la partie soins du corps cher à nos petits romains. Il faut savoir que tous les habitants n’ont pas l’eau courante chez eux et qu’ils vont donc dans les thermes publics. De fait avoir son balneum personnel est un atout de plus pour se démarquer de ses voisins. De taille bien plus modeste que les thermes publics, ils sont divisés en deux : le vestiaire et le tépidarium (bain tiède) d’un côté et le bain chaud de l’autre, sont situé près de la culina. Les fouilles ont fait émerger tout un nécessaire d’hygiène et de beauté : les baignoires, les miroirs, les strigiles, les vases à parfums et les bijoux. Par exemple pour se maquiller les femmes pouvaient se mettre de la poudre de cristal pour faire briller leur teint. Pour ce qui est du parfum, il n’y avait pas d’alcool (importé au VIIème seulement par les arabes), il s’agissait d’onguent à base de fleurs, de feuilles ou de résine mélangés à de l’huile et de la graisse animale.
Je ne parle pas de la cubiculum, chambre, car l’exposition ne l’évoque pas vraiment, tout comme le tablinum, le bureau du maître de maison, donnant sur l’atrium et où il reçoit pour affaires.

fontaine en mosaique. © Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei/Fotografica Foglia

Le jardin enfin : il faut savoir que presque toute les domi, ont un plus ou moins petit jardin. La verdure rentre dans cet espace clos, au milieu du péristyle. Si l’atrium est étrusque, le péristyle lui est d’influence hellénistique. C’est une cour non pavée mais un jardin, entouré d’un portique où se trouve également des sculptures, des fontaines, des mosaïques ou des jets d’eau. La muséographie de cette partie de l’exposition est très réussie au passage. Les murs bleus pâles amènent un sentiment de tranquillité agrémenté de petites musiques et la reconstitution de la fontaine en coquillage est superbe. On s’y croirait. Le jardin est un lieu qui évoque le rêve, le voyage et les mythes et l’exposition retranscrit parfaitement cet état. Le propriétaire peut aussi y montrer son érudition par des statues de philosophes ou des scènes historiques. La fameuse mosaïque de la bataille de d’Issos avec Alexandre le grand était située dans l’exèdre entre les deux péristyles de la Maison du Faune.

Murs du triclinium de la villa de Carmiano© Soprintendenza Speciale per i Beni Archeologici di Napoli e Pompei/Fotografica Foglia

Pour finir (le meilleur pour la fin ?) une des spécificités découvertes à Pompéi : la présence importance de représentations érotiques. Certes ça fait beaucoup sourire aujourd’hui, mais il faut savoir que pendant des siècles ces images étaient cachées. Certains chercheurs pensaient avoir trouvé une nouvelle Sodome ou Gomorrhe, et Charles III de Bourbon fit mettre sous clefs les images retrouvées. Eux qui pensaient les romains austères et stricts à l’image de Caton, les voilà confrontés à toute une série de représentation charnelle.
Ce qu’il faut savoir c’est que pour les romains il n’y a pas de jugements moraux ou religieux sur le sexe comme cela sera le cas avec l’Eglise chrétienne. Il fait partie de leurs vie quotidienne, est source de plaisir et de vie, ils le montrent donc. Il ne faut pas y voir une perversité accrue. Souvent ce sont des scènes mythologiques, des Vénus et des Mars, Ariane et Dionysos, Léda et le cygne ou encore des satyres et des nymphes. Mais attention, il ne faut pas croire pour autant qu’il n’y avait aucune règle. C’est juste qu’elles étaient plus sociales que morales : Sénèque illustra parfaitement cela par cette phrase: « l’impudicitia (la soumission sexuelle) est un crime pour un homme libre, un devoir moral pour le liberto et le devoir le plus absolu pour un esclave ». L’adultère n’est permis qu’aux hommes. Car la notion de plaisir est surtout masculine. Ces scènes de rapts, de satyres sautant sur les nymphes ont évoqué ce que les savants ont appelé « la sexualité du viol ». De même l’homosexualité est tolérée, mais l’homme libre doit être le dominant.

Phallus ailé avec 4 grelots

La représentation du phallus n’est  pas du tout symbole de perversité. J’ai personnellement adoré le phallus ailé. Ils avaient de l’imagination! Il représente la fécondité, il est ainsi représenté un peu partout, sur les murs des maisons, des échoppes et des boulangeries. C’est un porte-bonheur qui protège la demeure. Priape ou Mutinus Mutunus de son nom latin est un dieu de la fécondité qui protège les jardins et les cultures d’où sa représentation autour du péristyle.

Voilà, notre visite s’arrête ici. J’espère ne pas vous avoir assommé tout de même et vous avoir donné envie de partir à Pompéi, ou au musée Maillol…

PS: N’hésitez pas à suivre le site sur facebook et twitter, merci.

LIENS :

http://cms.museemaillol.com/wpcontent/uploads/2011/07/Dossier_de_Presse_-_Pompei_un_art_de_vivre.pdf
http://www.pompeiisites.org/
http://www.collegedevinci.com/IMG/netquiz/domus/le_triclinium.html
http://www.civilization.ca/cmc/exhibitions/cmc/pompeii/pompei7f.shtml

RANIERI PANETTA Marisa (dire.), Pompéi, Gründ, 2004.