A star is dead il y a 500 ans. Leonard au Louvre !

 

Il y a 500 ans disparaissait Leonardo Da Vinci à Amboise. Ce fils illégitime d’un notable florentin, devenu avec le temps l’un des plus grands artistes du fait de son talent et son érudition ne cesse encore aujourd’hui de fasciner et d’attirer les foules. Pour le célébrer comme il se doit, le Louvre qui possède la plus grande collection au monde de ses œuvres (merci François Ier) organise après 10 ans de travail l’exposition de tous les superlatifs. « Grandiose », «  historique », « exceptionnelle », « seul le Louvre pouvait le faire ». N’en jetez plus !
Et il est vrai que cette exposition était sans doute l’une des plus attendues et donc très fréquentées (330.000 réservations fin octobre). Mais qu’en est-il vraiment ?

L’exposition commence par la formation de Leonardo Da Vinci dans l’atelier de Verrocchio, sculpteur, peintre et orfèvre florentin. Chez lui notre Leonardo apprend l’importance de la lumière sur le rendu des formes. Comment les ombres et les clairs façonnent un objet, plus que la ligne. Vers 1478, il va plus loin en élaborant le componimento inculto (« composition inculte »). Un dessin libre, instinctif, en rupture avec la réalité des lignes fixes et en recherche de mouvement. Cette recherche picturale aboutira au fameux sfumato. Une superposition de léger glacis qui finit par gommer les contours et donner un aspect vaporeux à ses œuvres.

L’Étude pour la Madone au chat, British Museum. Source Wikipédia

Puis vient la période milanaise, jusqu’à l’invasion française par Louis XII en 1499. L‘artiste se diversifie et devient scénographe, mais aussi concepteur d’engins militaires. En 1500, il revient à Florence. La cité a subi quelques remous politiques, mais est désormais stable. Le gonfalonier de justice ouvre alors en 1503-1504, une compétition célèbre pour la réalisation de deux fresques sur des batailles florentines. Une sera réalisée par Leonardo, l’autre par Michel-Ange. Leonardo se frotte pour sa part à la bataille d’Anghiari. Malheureusement aucune de ces œuvres n’a survécu. Il ne nous reste que des dessins préparatoires pour avoir une idée de la fougue de cette fresque innovante à la composition déchaînée.

La partie de l’exposition qui est peut-être la plus fascinante est celle consacrée à l’homme de sciences. Grand humaniste de la Renaissance, Leonardo Da Vinci s’intéressait au monde qui l’entoure et ce depuis son enfance, quand son grand-père lui enseignait « Po l’occhio ! » (Ouvre l’œil !). Il étudie l’anatomie, l’optique, l’astronomie, la mécanique, la botanique, la zoologie et j’en passe. Ses feuilles (écrites de droite à gauche), illustrées de dessins techniques sont des merveilles à regarder. C’est dans cette partie que vous verrez dans le fond, l’Homme de Vitruve, prêtée à la dernière minute par l’Italie et qui restera que quelques semaines dans l’exposition du fait de sa grande fragilité.

La Madone Benois (1478) de Léonard de Vinci © The State Hermitage Museum, St Petersburg
La Madone Benois (1478) de Léonard de Vinci © The State Hermitage Museum, St Petersburg

Avec 10 peintures du maître, plus la Joconde en salle des états sur 20 connues et reconnues, on pourrait se dire waouh. Et pourtant, on sort de cette exposition avec un je ne sais quoi de manque. On est clairement sur notre faim. En fait, on a l’impression d’avoir vu beaucoup de dessin, du moins si on a réussi à se frayer un passage jusqu’à ces derniers. Alors oui, un dessin de Léonard c’est toujours merveilleux, c’est vivant, dynamique, et je ne parle pas de ses dessins scientifiques juste extraordinaires. Mais quand même ! De plus, si on regarde bien, dans le fond, une grande partie de l’exposition est consacrée à sa formation et présente donc des œuvres du maître Verrocchio. Se rajoute à cela l’impression de ne pas avoir eu beaucoup d’informations, et c’est peu dire, si on ne paye pas de guides ou d’audioguides. J’ai découvert aujourd’hui qu’il existait un livret sur le site du musée avec toutes les informations sur les tableaux, tout ce qui m’a manqué dans ma visite ! Peut-être que dans la précipitation et perdue dans la cohue j’ai manqué l’info sur place, mais un peu plus de textes sur les tableaux n’aurait pas fait de mal quoi qu’il en soit. Pour résumer, même si l’exposition regorge d’œuvres de premier plan, de dessins sublimes et tout et tout. On en sort un peu déçue et pour en avoir parlé autour de moi. Je ne suis pas la seule à me dire « beaucoup de bruit pas pour rien, mais beaucoup de bruit par rapport au contenu ». En comparaison, l’exposition sur Raphael était davantage complète et à plus d’un titre. Le propos était plus étoffé, la vie de l’artiste mieux expliquée et le corpus de peintures plus imposant.

Tête de femme dite La Scapigliata
Tête de femme dite La Scapigliata / Ministero dei Beni e delle Attività culturali – Complesso Monumentale della PiloEntrer une légende

Après, il est vrai qu’organiser cette exposition a été un parcours semé d’embûches diplomatiques et stratégiques. Quand un musée a un tableau de Léonard, il n’est pas fou, il ne veut pas le prêter et risquer de se priver d’une pièce majeure, privant l’exposition d’autres peintures majeures. Pas de Salavdor mundi non plus. L’oeuvre achetée pour une petite fortune soit disant pour être prêtée au Louvre pour cette exposition a tout simplement….disparu !

Malgré tout cela, je vous conseillerai de la faire cette exposition, car ça reste Léonard de Vinci, qu’on y voit des pièces sublimes, des pages de codex, et l’Homme de Vitruve, tout de même ! Mais n’oubliez pas de réserver sinon vous n’irez pas bien loin, et de choisir un créneau pas trop fréquenté, car être bousculé toutes les 2min gâche un tantinet l’expérience.

 

L'homme de Vitruve, dessiné par Léonard de Vinci
L’homme de Vitruve, dessiné par Léonard de Vinci © Getty / DeAgostini

 

LEONARD DE VINCI
Musée du Louvre
Du 24 octobre 2019 au 24 février 2020

 

Commissaire(s) :

Vincent Delieuvin, conservateur en chef du Patrimoine, département des Peintures, et Louis Frank, conservateur en chef du Patrimoine, département des Arts graphiques, musée du Louvre.

 

Hergé

Avec les fêtes qui approchent, on retourne en enfance cette semaine. Il y a deux expositions qui s’y prêtent Disney au musée des Arts Ludiques et Hergé au Grand Palais et c’est justement là que nous allons.

Tout le monde connaît Tintin et  le nom de son créateur en est indissociable et est tout aussi célèbre, fait relativement rare dans le monde de la bande dessiné.

Bienvenue à Moulinsart et par mille millions de mille sabords en avant.

L’exposition est franchement bien. On ne s’ennuie pas et pourtant j’ai l’ennui facile. On découvre toutes les facettes de ce grand dessinateur belge, les étapes de créations, ses autres œuvres, son travail publicitaire et le tout de manière très joyeuse.

On rencontre ainsi Georges Remi, le vrai nom d’Hergé (1907-1983), collectionneur et amateur d’art, amateur d’histoire et de sciences. Au fil des années, il se créé une réserve d’images dans laquelle il plonge régulièrement pour illustrer ses cases d’art moderne auquel il s’est initié avec plaisir se créant une collection personnelle.

Il est très intéressant de voir comment se construit petit à petit une bande dessinée. Il y a d’abord l’importance du texte, puis le dessin vient mettre en scène ce dernier, avec d’abord les esquisses, puis les épreuves à l’encre de chine avant le rajout des couleurs. Un petit reportage de Michel Drucker de 1978 avec Hergé et Yves Robert explique sous forme d’un cours d’école toute la conception d’une planche.

http://www.ina.fr/video/I08312557

Et bien sûre Hergé ne se réduit pas à Tintin, il y a aussi Jo, Zette et la publicité qu’il pratique avant de devenir célèbre.

En dehors de l’aspect purement créatif, il est aussi intéressant de plonger dans l’histoire qui touche de plein fouet Tintin, la Seconde Guerre mondiale ! Hergé dans un premier temps apparaît contre la guerre à travers les aventures de Monsieur Bellum.

Mais la guerre éclate et Bruxelles passe sous contrôle allemand. LA situation de Hergé se précarise et il accepte de travailler pour Le Soir, journal ouvertement collaborationniste, ce qui lui vaudra des problèmes à la fin de la guerre. Il faudra attendre 1946 pour qu’il soit définitivement blanchi.

Je vous conseille vraiment cette exposition toute en couleurs qui a le mérite de pouvoir se faire avec les enfants. Vous pourrez lire des planches et des planches, replonger dans l’enfance, voir une maquette géante de la fusée et une autre du château de Moulinsart. Du fun et en cette période de fêtes, c’est ce qu’on cherche.

Commissaires : Jérôme Neutres, directeur de la stratégie et du développemen108276220_ot à la Réunion des Musées nationaux-Grand Palais / Le musée Hergé, avec le soutien de Moulinsart.

Au Grand Palais jusqu’au 15 janvier 2017

 

Un retour furtif en enfance le temps d’une visite à Marmottan

Afficher l'image d'origineJe suis désolée de vous parler si tard de cette sympathique petite exposition qui finit dans une semaine, mais entre les grèves et autres, je n’ai pu y aller que la semaine dernière.

Nous sommes dans le charmant musée Marmottan dont je vous ai déjà parlé 2 ou 3 fois. Très mimi dans son hôtel particulier perdu au fin fond du 16° où  des collections sur le 1er Empire côtoient une belle collection d’enluminures mais surtout de très nombreux impressionnistes à commencer par Claude Monet et Berthe Morisot.

Aujourd’hui ce qui nous intéresse c’est l’exposition et son thème très très vaste : l’enfance.  Le musée décide de nous présenter à travers une centaine d’oeuvre l’évolution de la place de l’enfant dans notre société et notamment par_rapport_à l’adulte et ce du XVème au XXème siècle. Oui quand je dis très vaste, c’est  en fait encore en dessous de la réalité.

On commence donc pas les représentations de l’enfant Dieu et de l’enfant roi, longtemps les seuls bambins réellement présent dans l’art. Et pour cause. Le taux de mortalité infantile était tel qu’on devait en faire le plus possible pour espérer en voir un atteindre l’âge adulte.  On évitait donc de les représenter trop tôt.
De nombreux petits Louis XIV sont présentés avec ses tenues de mini-roi.  Il incarne l’espoir enfin retrouvé d’un futur pour la dynastie. Oui c’est que notre cher Louis Dieudonné a quand même mis 23 ans avant de pointer le bout de son auguste petit nez. On va le voir grandir en peinture, bébé, bambin, enfant, ado…et à chaque fois un rappel de son statut de d’héritier  puis de roi mais également une légitimation du pouvoir de la régente, sa maman, la reine Anne d’Autriche. En fait la représentation de l’enfance  de ce roi ou même plus tard de Louis XV est déjà un thème assez riche pour en faire une exposition à part. Mais ce n’est que mon avis. Messieurs de Versailles si vous me lisez….

Revenons donc chez le commun des mortels qui ne portent point de couronne ni d’ordre du Saint Esprit sur ses langes.

Je vous ai dit que la mortalité infantile est forte et que de fait on a peu de portraits d’enfant, mais il y en a quand même, j’en ai vu dans de nombreuses expositions et notamment des portraits posthumes  très touchants d’enfants déjà disparus. Ici c’est le portrait par Pierre Mignard de la petite Mademoiselle de Tours morte à l’âge de 7ans qui est particulièrement poignant. On y voit la fille naturelle de Louis XIV, toute charmante, comme une petite poupée en train de jouer avec ses bulles de savon qui sont une cruelle allégorie de la fragilité de la vie. Et je ne vous parle même pas du « Portrait d’un enfant mort » de Philippe de Champaigne ( ?) d’une tristesse absolu.

Heureusement l’innocence revient avec tout l’intérêt du Siècle des Lumières pour l’enfant et son éducation. L’allaitement est de nouveau à la mode, on se soucie de ces petits êtres, on commande de charmants portraits (Vigée Lebrun, François-André Vincent) et l’esprit de famille est célébré en peinture (Jacques-Augustin-Catherine Pajou) témoignant de l’amour que se portent les membres mais aussi de la continuité de la vie. J’ai beaucoup aimé le « Portrait de famille, dit autrefois Michel Gérard, membre de l’Assemblée nationale et sa famille en 1789 » par un artiste de l’entourage de David, en particulier la figure du père très attendrissante avec ses trois fils et sa fille qui veille sur eux en l’absence de la mère probablement décédée.
Le XVIIIème siècle est aussi celui des sciences pure, ainsi nous ne serons pas étonné de trouver des réflexions sur les avancements de l’obstétriques à travers des fascinantes gravures de Jacques-Fabien Gautier-Dagoty montrant une femme enceinte de l’intérieure ou encore ce petit Mannequin viscéral en ivoire des alentours de 1700 qui me rappelle ma poupée Maman surprise de quand j’étais moi aussi une enfant.

On passe ensuite au XIXème siècle où l’enfant est clairement plus présent dans les représentations artistiques aux aspects très différentes les unes des autres.  Comme le dit très bien le dossier de presse : « L’enfant est donc investi de toutes parts : médecins et savants, pédagogues et philanthropes, industriels, juristes, sans oublier bien entendu les familles ».

On a l’enfant-petit adulte et donc petit soldat qui prend les armes pour défendre la patrie à l’image des « Petits Patriotes » de Philippe-Auguste Jeanron  de 1830. J’ai regrettée dans ce thème l’absence de Barra par David. Il faut rappeler que les petits garçons seront éduqués au maniement des armes dans l’optique dans faire de futurs soldats pendant une bonne partie de ce siècle.  Mais nous avons aussi l’enfant des rues et miséreux (Pelez et Lepage magnifiques et poignants), l’enfant de la campagne et l’enfant impressionniste plus innocent, frais et idéal.

pates-de-sableLa partie XXème siècle ne s’intéresse pas tant à l’intérêt des artistes pour l’enfance qu’à l’intérêt pour l’art enfantin considéré comme plus brut et donc plus vrai. On cherche à retrouver cette innocence, ce synthétisme à l’image d’un Dubuffet et comme disait Picasso avec sa modestie légendaire : « Quand j’étais enfant, je dessinais comme Raphaël mais il m’a fallu toute une vie pour apprendre à dessiner comme un enfant. »

Le Peintre et l'enfant
Picasso Pablo (dit), Ruiz Picasso Pablo (1881-1973). Paris, musée Picasso. MP1990-36.

Et il est déjà l’heure de retrouver le monde des adultes. L’exposition était très sympathique avec de jolies œuvres, très variées et pour tous les goûts. Le seul petit bémol et il est vraiment petit c’est que le sujet est peut-être un peu trop vaste et que j’ai eu l’impression d’effleurer qu’une infime partie de ce dernier et je suis restée un peu sur ma faim. Mais encore une fois rien de dramatique.

L’ART ET L’ENFANT
Chefs-d’œuvre de la peinture française : Cézanne, Chardin, Corot, Manet, Monet, Matisse, Renoir, Picasso…
Du 10 mars 2016 au 03 juillet 2016.

 

Georges Desvallières, portrait d’un homme de foi et de peinture

Le Petit Palais une fois n’est pas coutume, nous propose à travers une exposition savamment mise en scène, de découvrir un artiste peu connu du grand public mais dont l’œuvre très éclectique mérite le détour.  L’artiste en question c’est Georges Desvallières (1861-1950). Je ne le connaissais que pour ses liens avec Maurice Denis et j’ai découvert un artiste complet à la peinture forte et expressive, qui sait faire vibrer la matière et les couleurs afin de donner le plus de profondeur à ses toiles.

George Desvallières, Autoportrait, 1891 Collection Domitille Desvallières-Rousse
autoportrait, 1891

 

D’une longévité importante (1861-1950), ses styles évoluent avec les époques et reflètent les préoccupations esthétiques de ces dernières.
Il est le petit-fils de l’académicien Ernest Legouvé qui prend en charge son éducation et c’est le peintre Jules-Élie Delaunay qui l’initie à la peinture en lui inculquant l’importance du dessin et de l’observation des maîtres, enseignement qu’il parfait à l’Académie Julian.  Mais c’est surtout la rencontre avec Gustave Moreau qui sera importante dans les premières années de sa carrière et son influence est palpable dans certaines de ses œuvres de jeunesse.

Delaunay et Moreau lui apportent chacun à leurs manières une façon de peindre qu’il synthétise. Ainsi dans sa représentation du corps, on retrouve à la fois l’importance de la ligne de Delaunay et l’intériorité psychique d’un Moreau. Cela donne des corps très athlétiques et nerveux qu’on retrouve sur toutes ses toiles mais les oeuvres religieuses qui viendront plus tard.

L’année 1903 est importante dans la carrière déjà bien avancée de G. Desvallières.  Avec Frantz Jourdain, Eugène Carrière, Victor Charreton, Félix Vallotton, Édouard Vuillard et Adrien Schulz, il créé le fameux « salon d’Automne » dont « le rôle est d’être excessif parce que le rôle des autres salons est d’être le contraire ». C’est le début d’une grande aventure qui contribuera à faire connaître les impressionnistes ou  les fauves à un large public populaire. Celui de 1905 révélera notamment Matisse.
En 1904 un nouveau tournant émerge dans l’art de G. Desvallières qui sera encore plus marqué dans l’entre-deux-guerres. Lui qui était jusqu’alors non pratiquant se converti au christianisme et sa foi nouvelle irradie de son travail. Très marqué par la guerre où il perd son fils Daniel, il participe activement à ce nouvel élan religieux qui naît suite à cette dernière. Abandonnant les œuvres profanes, il consacre tout son art à Dieu, liant dans un même élan créatif la Passion du Christ et le sacrifice des poilus. En résulte des oeuvres vibrantes parfois violentes comme ce Sacré coeur de 1905 où le Christ s’ouvre la poitrine devant la basilique du même nom. Il défend avec Georges Rouault un christianisme militant et social.
En 1919, il fonde avec Maurice Denis, les Ateliers d’art sacré (1919-1947), installés place de Furstenberg (Paris, 6e arrondissement), près de l’ancien atelier d’Eugène Delacroix. Il souhaite avec les Ateliers donner un nouvel art à l’église, un art moderne et poétique, anti-académique mais aussi en marge des nouveaux courants comme le cubisme. Dans l’esprit des corporations médiévales, des jeunes apprentis viennent se former dans les Ateliers pour répondre à des commandes précises, dans le but de redonner un décor aux églises dévastées par la guerre.

Dans les années 30, cet artiste reconnu de ses pairs devient membre de l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique et de l’Institut de France.

C’est un très beau parcours que nous propose le musée du Petit Palais avec une exposition pleine de couleurs et de vie à l’image de l’oeuvre de cet homme reconnu comme un grand de son vivant,un peu oublié de nos jours mais qui renaît dans  l’antre de ce musée que j’adore toujours autant.

Pour en savoir plus :

Georges Desvallières, la peinture corps et âme au Petit Palais
Jusqu’au 17 Juillet 2016 au Petit Palais.

Commissariat :

Isabelle Collet, conservateur en chef au Petit Palais, commissaire
Catherine Ambroselli de Bayser, conseiller scientifique

http://www.georgedesvallieres.com/

Hubert Robert, l’imaginaire de la ruine

L’un Élisabeth-Louise_Vigée-Le_Brun_-_Hubert_Robert_(1788)de mes peintres préférés est en ce moment à l’honneur au musée du Louvre et c’est trop bien. L’occasion pour beaucoup de découvrir ce dernier, de mettre un nom sur ses fameuses ruines, vous l’aurez deviné, je parle d’Hubert Robert.

Le parcours commence avec deux portraits de l’artiste, réalisés par deux de ses amis intimes Augustin Pajou et Elisabeth Vigée-Lebrun, qui nous présentent un bonhomme jovial, simple et sympathique qu’on a envie de connaître mieux et cela tombe bien, c’est pour ça que nous sommes là.

Homme instruit, Hubert Robert accompagne le comte de Stainville à Rome en 1754 qui lui obtient une place à l’Académie de France qui se situait alors au palais Mancini. Il y suit notamment les cours de Giovanni Panini qui aura une grande importance dans son œuvre.  

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Hubert Robert (1733-1808) Caprice avec le Panthéon devant le port de Ripetta, 1761 Huile sur toile -101,9 x 145,9 cm Liechtenstein. The Princely Collections, Vaduz–Vienna © LIECHTENSTEIN. The Princely Collections, Vaduz–Vienna

Hubert Robert s’oriente vers cette peinture d’architecture, c’est d’ailleurs à ce titre qu’il sera reçu à L’Académie Royale de Peinture et de Sculpture en 1766 avec Le Port de Ripetta à Rome. Mais en artiste du XVIIIème siècle, il est fortement marqué par les Capricci, ces paysages fantaisies et idéalisés, mêlant vrai et faux et dont Pannini est le digne représentant romain.  Ainsi ses œuvres ne sont pas de simples vues de Rome, de ses monuments et de ses ruines. Il aménage ses vues selon son imaginaire, recréant une autre Rome, un peu comme un condensé de ce qu’est pour lui la Ville éternelle, mêlant passé, présent et futur.   Ses dessins sont absolument merveilleux, il faut voir comment en quelques lignes appuyées, il compose toute une architecture, simplement rehaussée de hachures, c’est époustouflant. Il maitrise également parfaitement l’harmonie de la composition et des couleurs. Chacune de ses toiles est un spectacle où se mêlent le grandiose qui prend la forme des pierres ou de la nature sauvage à l’anecdotique, ces petits personnages bien vivants, lavant, dansant, s’aimant…Et je ne m’attarderait pas sur les aquarelles qui sont si charmantes que j’en prendrais bien une chez moi.

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Hubert ROBERT (Paris, 1733 – Paris, 1808), Jeunes filles dansant autour d’un obélisque, huile sur toile, 120 × 99 cm, Musée des beaux-arts de Montréal, 1798


Bien qu’il donne l’impression de représenter le passé, Hubert Robert est surtout un formidable témoin de son époque, ce XVIIIème siècle en pleine ébullition qui va bientôt plonger dans la Révolution. Comment ne pas s’étonner devant cette vue de la Fontaine de Trévi, non achevé avec encore ses échafaudages où celles de Paris en pleine évolution avec le Pont Neuf débarrassé de ses maisons, lui conférant un aspect à la fois lunaire et dramatique et bien évidemment sa fameuse peinture de la Bastille en plein démembrement ou dans le même style celle du château de Meudon. C’est comme si Hubert Robert était à la croisée des chemins du temps, et on sent que cette question le hante dans certaines de ces œuvres, comme avec ses danseuses tournant encore et encore autour de l’obélisque brisé. Témoin de son temps, il l’est aussi de manière plus anecdotique, quand emprisonné en 1793 car trop proche de la royauté, il peint encore et encore en nous racontant ainsi son incarcération, les soucis du quotidien, le dénuement, peignant jusque sur des assiettes quand le papier venait à manquer. Il se représente lui-même dans sa cellule de de la prison Sainte-Pélagie avec écrit sur la table « Dum spiro spero », « tant que je respire, j’espère ».

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Il se montre également visionnaire avec ses vues de la Grande Galerie, d’abord complétement détruite par la folie des hommes et le passage du temps face à un Apollon du Belvédère toujours droit et présent, puis surtout avec ses études pour l’éclairage zénithale qui inspireront les architectes quelques années plus tard.

Je suis peut-être à côté de mes pompes, mais je trouve qu’Hubert Robert a un petit côté préromantique. En particulier dans ces peintures d’incendies. Rome est en flamme dans le fond et toute la toile beigne dans une lueur rougeâtre angoissante. C’est encore une fois l’humanité en proie à ce qu’elle ne peut pas maîtriser, non plus le temps mais le feu dévastateur.

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Hubert Robert, L’Incendie de Rome, vers 1770-1785 huile sur toile, 75,5 x 93 cm, Musée d’Art moderne André-Malraux, Le Havre

Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé cette exposition qui m’a rappelé sur certains points celle sur Turner en particulier parce que dans les deux cas je m’extasiais de tout et que je la referais surement avant sa fin le 30 mai.

Si vous avez envie de voyages et de rêves, je vous conseille vivement d’y aller vous aussi. C’est beau, c’est grand, c’est Hubert Robert et c’est le Louvre.

😉

Commissaire(s) :

Guillaume Faroult, musée du Louvre.

Jusqu’au 30 mi 2016 en association avec la National Gallery de Washington.

 

Louis XV à Fontainebleau

Cette semaine nous sortons un petit peu de Paris pour nous diriger vers l’un de ces lieux qui ont fait l’Histoire de France et qui la résume le mieux. Non, pas Versailles, mais Fontainebleau. Le château de Fontainebleau est à mes yeux l’un des plus beaux qui soit, je l’adore et je l’ai déjà dit sur ce site.

En ce moment, c’est une exposition consacrée au roi Louis XV qui s’y déroule et dont je vais vous parler.

Louis XV, le Bien Aimé roi mélancolique passait tous ses automnes entre 1724 et 1773 dans ce grand domaine. C’est ici, dans cette jolie chapelle qu’il se marie avec la discrète Marie Leszczyńska le 5 septembre 1725. C’est également là que décède son unique fils, le dauphin Louis, père du futur Louis XVI en 1765.

Le propos de l’exposition n’est pas le règne ou la personnalité de ce roi peu banal, mais davantage la trace qu’il laissa dans la décoration du château et sa passion pour la vénerie qui le ramenait inlassablement entre ces murs multi centenaires. Une centaine d’œuvres sont ainsi là pour témoigner du gout de cette époque, de ce XVIIIème siècle lumineux du point de vue artistique.

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Un énorme chantier de restauration d’œuvres a été lancé à l’occasion de cette grande exposition 2016. L’occasion d’expliquer au grand public ce travail minutieux et sans fin qu’est l’entretien d’un tel château et de son mobilier.

Nous découvrons par exemple des consoles du Cabinet du conseil du roi qui était contigu à la Chambre du roi, agrandi par Gabriel en 1774 et décoré notamment par Boucher ou Van Loo dans ce style rocaille très en vogue ou un tapis de la Savonnerie.

Les goûts personnels de la reine sont également évoqués par un panneau sculpté en chêne de son cabinet et du lambris de l’Oratoire. Le tout à la fois raffiné et discret. Tout comme les Quatre Saisons de Jean-Baptiste Marie pierre qui reflètent le goût de l’époque pour les Bambochades, ces scènes de genre venues initialement de Rome.

Mais la partie la plus surprenante est cet appartement des chasses ouvert exceptionnellement le temps de l’exposition. Le roi Louis XV est certainement celui qui pratiqua la chasse à courre avec le plus de passion et pour montrer son amour de cette pratique, il commanda à Jean-Baptiste Oudry considéré alors comme le plus grand peintre animalier du moment, une série de 9 tapisseries pour son rendez-vous de chasse préféré, Compiègne. Mais les cartons de ces dernières étaient si achevés, qu’ils furent considérés comme des œuvres en soit et encastrés au XIXème siècle pour l’appartement du duc D’Aumale. Cet appartement avait été aussi la chambre de Monsieur, frère de Louis XIV ou de Christian VII du Danemark dont la tenue de chasse est exposée. Ces toiles sont des témoignages uniques et grandioses des chasses de Louis XV notamment d’un point de vue historique pour l’étude des tenues d’équipages très codifiées. On peut également admirer, toujours d’Oudry, des surprenants trompes l’œil qui représentent les têtes bizardes (bois de cerf anormaux) chassés par le roi, avec la date précise et au rendu illusionniste parfaitement maitrisé.

Ces appartements des chasses sont peut-être le témoignage le plus marquant du règne de Louis XV et son empreinte sur le château car ils témoignent du goût de l’époque mais aussi du roi.

Une exposition sympa donc, et puis surtout une occasion de retourner à Fontainebleau et d’en découvrir des aspects méconnus

Du 2 avril au 4 juillet 2016 Commissariat Vincent Droguet, conservateur général, directeur du patrimoine et des collections du château de Fontainebleau Jean Vittet, conservateur en chef Vincent Cochet, conservateur en chef

 

Jean-Baptiste Huet, l’animalier joyeux

Le musée Cognac-Jay (à visiter absolument pour les amoureux du XVIIIème) nous propose en ce moment une exposition consacrée à un illustre inconnu : Jean-Baptiste Huet (1745-1811), peintre membre de l’Académie royale de peintures tombé dans l’oubli de l’Histoire de l’art. Sa peinture reflète parfaitement son époque, pleine de couleurs gaies et de jolies bergères, c’est la joie picturale de l’époque rocaille.

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Jean-Baptiste est avant tout un peintre animalier comme en témoigne son morceau de réception à l’Académie royale en 1769 avec « Un dogue se jetant sur des oies ». Ces œuvres animalières, comme la plupart des artistes de son temps imprégnés de sciences, sont très naturalistes et en plus des animaux exotiques, elles représentent les animaux de la ferme qu’il peut côtoyer chez lui dans sa propriété de Villiers-sur-Orge. Comme tous les peintres ayant ce type de spécialisation, il travaille beaucoup à l’aide de dessins, de croquis pris sur le vif à la Ménagerie de Versailles ou ailleurs. L’exposition présente d’ailleurs certains de ces dessins, plein de finesse. On est malgré tout assez loin de la rigueur anatomique d’un Desportes ou du soucis théâtral d’Oudry, mais ses œuvres ont un certain charme.WP_20160315_14_49_49_Rich_LI.jpg

En bon peintre rocaille, comme je l’ai dit en introduction, Huet aime à représenter de belles pastorales où les jolies bergères aux joues roses flânent dans la campagne. Le genre de la pastorale a été mis au goût du jour par Boucher et connu aussi de belles heures avec Fragonard. Le monde rural est dans toutes ces œuvres idéalisé, comme un joyeux rêve et dedans s’y retrouvent les amours des dieux.

La dernière partie est consacrée aux éléments de décor si important au XVIIIème siècle à travers entre autres, la toile de Jouy. Huet s’y révèle en véritable ornementaliste mêlant les éléments rocailles (espagnolette et autre) et les éléments témoignant du néoclassicisme naissant. Ses réalisations essentiellement pour des cercles privés lui firent jouir d’un bon niveau de revenus et cette absence ce commandes royales explique aussi la renommé discrète de Huet. Les années 1780 sont particulièrement intéressante pour sa production, c’est durant cette décennie qu’il intensifie sa collaboration avec Jouy avec une quarantaine de dessins. C’est d’ailleurs surtout à travers ses délicates toiles que son nom est connu

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Bien que petite, cette exposition met bien en lumière la diversité picturale de ce peintre. Jean-Baptiste Huet est l’image même du peintre du XVIIIème siècle et nous découvrons ses différentes facettes toutes charmantes. En plus c’est l’occasion de découvrir ce petit musée Cognac-Jay qui regorge de trésors, comme de très beaux Boucher.

Bonne visite!

plus que quelques jours pour admirer la garde robe de la « divine comtesse »

imageIl vous reste quelques jours pour profiter de l’exposition consacrée à la fascinante comtesse Greffulhe, une femme étonnante, cultivée, protectrice des arts et amatrice de mode d’où sa présence au musée Galliera.

Élisabeth de Riquet de Caraman-Chimay (1860-1952) appartient à la très bonne société, elle est la nièce de Robert de Montesquiou et elle épouse à 18 ans, en 1878 le future comte Henry Greffulhe. Mais c’est sous les traits de la duchesse de Guermantes, personnage de A la recherche du temps perdu de Marcel Proust qu’elle devient immortelle.

En plus d’être une très belle femme dont la beauté éblouie ses contemporains – Proust disait d’elle, « tout le mystère de sa beauté est dans l’éclat, dans l’énigme surtout de ses yeux. Je n’ai jamais vu une femme aussi belle. »- la comtesse a aussi de l’esprit. Dans son salon rue d’Astorg, ou dans son château, de Bois-Boudran ou encore dans sa villa de Dieppe, elle reçoit Anatole France, prend des cours avec Nadar, organise aussi des représentations lyriques, comme celle de Béatrice et Bénédict d’Hector Berlioz au théâtre de l’Odéon en 1890 et la première représentation parisienne de Tristan et Isolde de Richard Wagner, elle favorise avec la princesse Edmond de Polignac la venue à Paris des Ballets russes, soutient Marie Curie, se passionne pour les travaux d’Edouard Branly et est également un soutient du colonel Dreyfus ou du Front populaire malgré ses origines aristocratiques. Une femme aussi belle qu’étonnante je vous dis !!!

Elégante, elle sait se mettre en scène et prépare ses apparitions avec minutie, prenant grand soin de sa toilette. Une cinquantaine de modèles sont présentés dans l’exposition, griffés Worth, Fortuny, Babani, Lanvin, Nina Ricci. Chacune des tenues témoigne d’une part du bon goût de la duchesse, d’autre part de sa grande modernité. Elle suit la mode et s’habille dans l’air du temps, et elle en a connu des époques : elle vécut la fin du Second Empire, deux républiques, deux guerres mondiales, connut la Belle Époque et les Années folles.

Certaines pièces sont absolument merveilleuses et donne envie de se glisser dedans pour faire revivre les fastes du passé comme cette cape russe offerte par Nicolas II lors de sa visite à la comtesse en 1896 qui fit encore sensation quelques années plus tard comme en témoigne un article du Figaro du 15 avril 1904. Elle avait en effet fait mettre sa cape au gout du jour par Worth et la porta lors d’une soirée lors d’une soirée de gala organisée au théâtre Sarah-Bernhardt au bénéfice des blessés russes.
Les robes de Worth sont celles que j’ai le plus aimées, elles sont magiques :
– la robe de tea-gown, en velours ciselé bleu foncé sur fond de satin vert qui mettait sa chevelure auburn en valeur, met parfaitement sa ligne en évidence.
– la robe byzantine portée pour le mariage de sa fille, dut quant à elle faire bien des jalouses, elle était « […] fascinante jusqu’à l’éblouissement, dans une sensationnelle toilette d’impératrice byzantine : robe de brocart d’argent couverte d’artistiques broderies à reflets nacrés rehaussés d’or et de perles fines, ourlée d’une bande de zibeline. Splendide collier de chien et sautoir en perles fines. Immense chapeau en tulle argent bordé de zibeline, avec, de chaque côté, de volumineux Paradis, entre lesquels se dressait droit et fier, un énorme diamant brillant comme une grosse larme de joie irisée de soleil […] » (La Femme d’aujourd’hui, décembre 1904).
Et que dire de la « robe aux lys », faite spécialement pour elle, avec sa taille princesse et se motif de lys rappelant le poème de Robert de Montesquiou
« Comme un beau Lis d’argent aux yeux de pistils noirs
Ainsi vous fleurissez profonde et liliale,
Et, tout autour de vous, la troupe filiale
Des fleurettes s’incline avec des encensoirs. »

C’est cette robe fabuleuse qu’elle porte sur de nombreuses photos dont sa photo d’identité.
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Une belle exposition, surtout pour femmes il faut l’avouer où on découvre une belle personne à travers ses robes, ce qui est une manière originale de découvrir quelqu’un, mais quand on dit que ce que l’on porte est le reflet de notre personnalité, ce n’est que trop vrai dans ce cas.
Le seul bémol revient aux armatures de bois des podiums trop visibles qui gâchent un peu la mise en scène, très jolie au demeurant, mais qui du coup a un côté pas fini. Rien de bien grave en somme au regard de la qualité de l’exposition. Le seul problème de ce genre d’exposition, c’est qu’après on veut gagner au loto pour être aussi élégante avec toutes ses toilettes….

LES ROBES TRÉSORS DE LA COMTESSE GREFFULHE

Du 7 novembre 2015 au 20 mars 2016
Musée Galliera
Commissariat :
Olivier Saillard, directeur du Palais Galliera,
Et l’équipe de la conservation et de la documention du Musée de la Mode de la Ville de Paris,
Alexandra Bosc, Laurent Cotta, Sophie Grossiord, Sylvie Lécallier et Sylvie Roy.

 

L’effroi sublimé au Musée de la vie Romantique

Afficher l'image d'origineJe pensais avoir fait le tour de la plupart des expositions en attendant la nouvelle fournée qui commence essentiellement en mars, mais j’avais oublié le Musée de la Vie Romantique et son exposition sur les « Visages de l’effroi ». A une semaine de sa clôture, je me suis donc dépêchée de m’y rendre et j’ai plus que bien fait. Le musée d’Orsay avait déjà mis en lumière ces œuvres torturées du XIXème siècle, tournées vers l’obscurité de l’âme et les drames historiques et mythiques dans « Crime et Châtiments » et « l’Ange du bizarre ». L’intérêt ici ce sont les œuvres uniquement françaises, des œuvres moins connues d’artistes moins célèbres du courant néoclassique ou romantique.
Les néoclassiques en tant que témoins des troubles révolutionnaires et des guerres napoléoniennes ont une vision très froide de l’horreur, les romantiques de leurs côtés façonnement une nouvelle esthétique, crépusculaire, aux frontières du fantastique.
Le parcours est construit autour de 4 thèmes : La chute des héros, Martyrs profanes, martyrs chrétiens, Violences et réalités et Les affres de l’Au-delà.

La chute des héros fait référence à cette période révolutionnaire et postrévolutionnaire où la conscience d’un monde en plein changement, et que plus rien ne sera comme avant  habite les artistes. Les néoclassiques tentent de renouveler les thèmes en puisant dans l’Histoire antique des sujets héroïques. Pour ces héros d’un autre temps, la violence est brute et vertueuse et contribue au sublime. Chez les romantiques, avec le salon de 1824, Delacroix, Boulanger et Devéria font fi des convenances et peignent une violence sans fard. Les œuvres sont poignantes, les héros de ces toiles se tordent de douleurs et le sang coule à flot quand ce n’est pas la misère sordide et froide du quotidien qui est mise en avant.

Afficher l'image d'origine
Cette Révolution qui sacrifie tant et tant d’êtres pas forcément coupables alimente une esthétique nouvelle. Les héros révolutionnaires deviennent des saints martyrisés, comme Marat dans sa baignoire. La Restauration redonne sa place d’honneurs aux œuvres religieuses mais la façon de peindre a changé et l’héritage reste. Cette mère terrorisée peinte par Cogniet pour son « Massacre des Innocents » en 1824 est criante de réalité. Sa douleur est réelle et la violence qui se prépare est presque palpable.
Avec la presse qui se développe, la grande nouveauté pour ces peintres c’est la possibilité de peindre des affaires contemporaines toutes aussi sordides les unes que les autres. Les journaux sont une bible d’histoires sans cesse renouvelées. La terrible affaire Fualdès, ancien procureur impérial Fualdès égorgé dans la nuit du 19 au 20 mars 1817 à Rodez inspire à Géricault une série d’esquisses préparatoires en vue d’un grand tableau monumental qu’il ne réalisera pas au profit du Radeau de la Méduse, autre fait contemporain.
La littérature elle aussi en pleine mutation continue à être une source d’inspiration pour tous ces peintres en quêtes d’histoires nouvelles, ainsi La fiancée de Lammermoor de Walter Scott donne à Emile Signol « La folie de la fiancée de Lammermoor » où la malheureuse Lucy Ashton se tient recroquevillée dans sa cheminée, les yeux remplit de folie.
La dernière partie est consacrée au Romantisme noir et porte sur toute cette production irrationnelle, sombre et fantastique avec une large part consacrée au mythe d’Ossian, invente entre 1760 et 1773 par James Macpherson qui constitue une nouvelle mythologie.

 

C’est une exposition extraordinaire avec sa part d’ombre comme je les aime. J’avais déjà aimé toutes les précédentes sur le sujet. Ces œuvres sont un volet important de l’Histoire de l’art du XIXème siècle, et c’est toujours très intéressant de les retrouver et d’admirer comment tous ces artistes ont retranscrit la violence de leur époque, une violence qu’on oublie souvent quand on pense au XIXème siècle.

Je sais que je m’y prends tard, mais en cette semaine de vacances, si vous pouvez y faire un petit tour, n’hésitez pas.

 

VIOLENCE ET FANTASTIQUE DE DAVID À DELACROIX

Musée de la Vie romantique

3 novembre 2015- 28 février 2016

 

 

Une (très) brève histoire de l’avenir au Louvre. L’exposition qui invite à la réflexion…

La semaine dernière je suis allée voir la dernière exposition du Louvre dont le titre « Une brève histoire de l’avenir » et l’affiche m’attiraient et m’intriguaient. Inspirée du livre éponyme de Jacques Attali sorti en 2005 chez Fayard, cette expo est un dialogue entre art ancien et contemporain à travers différentes thématiques : l’ordonnancement du monde, les grands empires, l’élargissement du monde et le monde d’aujourd’hui.

C’est un peu un aperçu d’une certaine histoire de l’Humanité vu par un prisme artistique très large allant de l’art très ancien, à des objets archéologiques et  des installations contemporaines.

Tomás Saraceno (né en 1973), Vue de l’exposition « Hybrid Solitary... Semi- Social Quintet... On Cosmic Webs... » à Tanya Bonakdar Gallery et à la Biennale d’architecture de Chicago, avec les oeuvres Hybrid semi-social solitary musical instrument Arp87: built by a couple of Cyrtophora citricola-one month, one Agelena labyrintica-two months, one Cyrtophora moluccensis-two weeks, and one Tegenria domestica-four months (turned 4 times 180 degrees on Zaxis). 2015. Soie d’araignée, fibre de carbone, éclairage, trépied. Atelier de l’artiste© Tomás Saraceno
Tomás Saraceno (né en 1973), Vue de l’exposition « Hybrid Solitary… Semi-
Social Quintet… On Cosmic Webs… » à Tanya Bonakdar Gallery et à la
Biennale d’architecture de Chicago, avec les oeuvres Hybrid semi-social solitary
musical instrument Arp87: built by a couple of Cyrtophora citricola-one month, one
Agelena labyrintica-two months, one Cyrtophora moluccensis-two weeks, and one
Tegenria domestica-four months (turned 4 times 180 degrees on Zaxis). 2015. Soie
d’araignée, fibre de carbone, éclairage, trépied. Atelier de l’artiste© Tomás Saraceno

En fait c’est un peu difficile à expliquer, au début je lisais consciencieusement les panneaux explicatifs mais je me suis rendue assez rapidement compte que le meilleur moyen d’essayer d’apprécier le message c’était de se laisser porter par les œuvres. Alors certes on risque ainsi de louper une partie du message, mais ce dernier était à mon goût trop philosophique pour me garder attentive de long en large.

Le fond repose sur un questionnement par rapport à notre regard actuel sur comment s’est façonnée l’Humanité aux grés d’inventions (l’écriture), de changements de société (les premières grandes villes), d’échanges commerciaux et culturels, de guerres, de découvertes, d’élargissement du monde connu, de révolutions humaines et industrielles etc etc. Et cette réflexion doit nous mener à nous interroger sur notre avenir.

Le dossier de presse est très bien fichu et j’aurai peut-être dû le lire avant d’y aller, car je dois avouer que je me suis sentie un peu démunie devant certaines œuvres, surtout contemporaines. Après il faut dire que j’ai souvent du mal avec le fait de faire se parler des formes d’art de différentes époques, c’est toujours très subjectif. On adhère ou on est perdu. Et quand c’est pour résumer des dizaines de milliers d’années d’histoire…ce n’est pas évident de suivre le fil.

Mais ça reste une exposition très intelligente, pas seulement une succession de peinture présentées pour attirer des visiteurs et faire marcher la billetterie et en cela on ne peut que féliciter le musée du Louvre qui se place dans une ligne scientifique très pointue  appréciable pour le plus grand musée du monde. Il ne se contente pas de faire venir des millions de touristes, il leurs parle et fait appel à leurs intelligences et pas seulement à leur propension à tout prendre en photo.

Composition1Pour ma part, j’adoré la série de peintures de Thomas Cole, The course of Empire, présentée pour la première fois en France. Ces 5 peintures racontent le schéma classique de la naissance d’un Empire, son ascension, son apogée et sa chute. Ces toiles peintes entre 1833 et 1836 sont très belles mais invitent aussi à une réflexion sur l’Histoire de l’homme et des civilisations qui s’achèvent toutes à un moment ou à un autre ; la conquête du paysage et comment finalement la nature reprend ses droits à la fin. Magnifique !
Autre jolie découverte, le panorama de Zuber, les Zones terrestres, très coloré, et dans le contemporain j’ai bien aimé les toiles d’araignée de Tomás Saraceno qui expose ainsi des toiles tissées par des araignées de différentes régions du monde, filées successivement les unes sur les autres ou les compositions fleurales de Camille Henrot qui traduit dans le langage poétique ou scientifique des fleurs des ouvrages littéraires qu’elle a particulièrement aimé.

En bref, une impression de joyeux bric à brac mais non dénué d’intérêt.

Du 24 Septembre 2015 au 4 Janvier 2016

Commissaire(s) :

Dominique de Font-Réaulx, musée du Louvre, Jean de Loisy, président du Palais de Tokyo, avec la collaboration de Sandra Adam-Couralet, critique d’art, et de Martin Kiefer, musée du Louvre.

Conseiller scientifique :
Jacques Attali